La co-analyse consiste à associer les participants au traitement des données, par exemple en codant ou en catégorisant collectivement des entretiens ou des observations. La co-interprétation, quant à elle, intervient plutôt en phase aval, une fois les premiers résultats établis par le chercheur.
Intégrer le savoir expérientiel
En confrontant les données aux vécus des participants, aussi appelés co-chercheurs, il devient possible d’affiner certaines conclusions, de limiter certains biais, ou de remettre en question des explications a priori évidentes d’un point de vue scientifique. Ces éclairages issus du terrain révèlent souvent des liens pertinents ou inattendus, invisibles à un niveau de lecture strictement académique.
La démarche améliore également la qualité du lien entre chercheurs et acteurs de la société civile. L’implication dans l’interprétation des résultats facilite l’adhésion aux conclusions et leur diffusion au sein des communautés.
Enfin, la participation aide les co-chercheurs à mieux comprendre les rythmes de la recherche, notamment les phases d’analyse, qui peuvent parfois sembler longues, ou donner l’impression que le travail est à l’arrêt.
Préparer et accompagner la co-analyse
Si les démarches de co-analyse et de co-interprétation ouvrent des perspectives stimulantes, elles ne s’improvisent pas. Tous les chercheurs n’y sont pas nécessairement préparés, en particulier ceux issus de disciplines peu familières des méthodes utilisées en sociologie.
Avant de se lancer, il convient d’évaluer avec lucidité ses propres compétences méthodologiques et relationnelles, et de s’appuyer, si besoin, sur des collaborations avec des collègues expérimentés dans ce type de recherche participative.
La qualité du processus repose aussi sur l’accompagnement des co-chercheurs : lorsqu’une participation active est prévue, un temps de formation en amont est indispensable pour instaurer un cadre de travail commun et prévenir toute mise en difficulté.
Certains participants peuvent préférer rester dans une posture d’observateurs ou se contenter d’un échange ponctuel. Pour autant, le simple fait d’être invité à réagir aux résultats contribue au renforcement du lien de confiance.
Bonnes pratiques
Pour que la co-analyse et la co-interprétation tiennent leurs promesses, certaines conditions pratiques sont essentielles :
- Privilégier le travail en présentiel, sur plusieurs journées, afin de favoriser la confiance et la qualité des échanges.
- Prévoir une phase pédagogique en amont, pour familiariser les participants aux outils et méthodes d’analyse avant le travail en petits groupes.
- Éviter que les participants analysent leurs propres données, afin de limiter les biais et préserver la rigueur méthodologique.
- Consacrer un temps préparatoire suffisant, souvent sur un à deux ans, pour instaurer une relation de confiance, connaître les partenaires et définir le bon niveau d’implication.
- Organiser des temps de mise en commun réguliers, propices à l’émergence de consensus sur les interprétations.
- Faire preuve de transparence sur l’usage des propos recueillis, pour valoriser la parole des participants et renforcer leur engagement.
Certains projets vont plus loin encore dans l’implication des co-chercheurs. Plusieurs équipes ont, par exemple, organisé la co-écriture d’un livret retraçant l’expérience des participants, diffusé ensuite au sein des associations partenaires. Ce type d’initiative constitue une manière concrète et symbolique de reconnaître la valeur de leur contribution.