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De la recherche au traitement : l’aventure entrepreneuriale de Patrick Collombat

Chercheur Inserm à l’institut de biologie Valrose à Nice, Patrick Collombat a mis au point un traitement du diabète de type 1 par régénération des cellules produisant l'insuline. Soutenu par Inserm Transfert, il a levé avec ses partenaires plus de 33,5 millions d’euros. De l’idée à la start-up, retour sur une réussite entrepreneuriale.

National
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Le candidat médicament développé dans le cadre du projet de Patrick Collombat, DiogenX, pourrait devenir la première solution pour régénérer les cellules bêta du pancréas et le premier traitement contre le diabète de type 1 symptomatique. Avec le potentiel de régénérer les propres cellules bêta du patient et de restaurer sa fonction pancréatique, le candidat principal de DiogenX laisse entrevoir une large utilité clinique.

Breveter son idée

Tout commence par un financement Inserm de 12 000 € appelé Copoc. Cette enveloppe, dite de pré-maturation, est gérée par Inserm Transfert et permet au chercheur de financer la première étape de son projet de valorisation : démontrer que le concept théorique, l’idée scientifique liée au projet peut être réalisée dans la pratique. C’est la preuve de concept. Elle permet de prouver que l’idée pourrait être développée pour des applications médicales. 

Dans le cas de Patrick Collombat, bien que les premiers essais soient prometteurs, certains outils techniques font défaut pour valider le projet. Malgré ce revers, le chercheur parvient à négocier une seconde enveloppe de maturation, et la collaboration avec Inserm Transfert se consolide. Cette fois, le succès est au rendez-vous : l’équipe d’accompagnement d’Inserm Transfert dépose une demande de brevet. Elle négocie également la licence pour le chercheur. Le dépôt précoce de la demande et de la licence sont cruciaux pour protéger le projet du chercheur. 

Le dépôt d’une demande de brevet repose sur une déclaration d’invention et une étude de brevetabilité. Cependant, les aspects scientifiques et juridiques ne sont pas les seuls à considérer.

Avant de déposer une demande de brevet, il est important de prendre en compte les différents aspects tels que le besoin clinique, l’intérêt pour les industriels et les investisseurs, car il faut également avoir une visibilité optimale sur ce qui pourra être financé et développé concrètement.
Mathi Siva
Ingénieure brevets à Inserm Transfert

Dans le cas de Patrick Collombat, le projet ouvrait sur deux possibilités de brevets, mais les échanges avec les partenaires financiers menèrent finalement vers le choix d’un unique dépôt. 

En parallèle, la réflexion de Patrick Collombat sur l’aventure de l’entrepreneuriat fait son chemin, notamment grâce à Jean-Pascal Tranié, le premier investisseur intéressé par son projet : « Il m’a suggéré l’idée de la start-up. Sans lui je serais probablement resté focalisé sur la compréhension des mécanismes du diabète. J’avais également une collègue qui s’était lancée sur la voie de l’entrepreneuriat et avait vendu une molécule à Pfizer. Cet environnement a sans doute joué un rôle dans ma prise de décision. »

Le développement de la partie entreprise du projet s’accélère à partir de 2019. M. Collombat rencontre Benjamin Charles, un entrepreneur dans le domaine de la santé, à qui il présente son projet. Benjamin Charles, doté d’une forte expertise en développement d’affaires, notamment acquise dans le cadre de la création d’une société spécialisée dans la modulation des lymphocytes T gamma delta, est convaincu et devient directeur de la start-up. L’équipe est au complet : un expert scientifique, un directeur d’entreprise, et un expert financier.

Parcours pré-entrepreneurial 

La participation aux Rencontres du Parcours pré-entrepreneurial d’Inserm Transfert est un moment charnière. Ce moment du parcours permet aux porteurs de projet de présenter celui-ci à un panel d’experts bienveillants en lien avec l’univers de la valorisation industrielle. Lors de la présentation, Patrick Collombat, Benjamin Charles et Jean-Pascal Tranié font face à une vingtaine de professionnels de la création d’entreprise en santé humaine : des investisseurs, des serial entrepreneurs, conseillers en stratégie de développement… 

Au début, tout cela fait un peu peur car on ne sait pas par où amorcer la construction de la start-up, mais grâce à mon équipe, tout s’est bien passé. Par ailleurs, le système français est plutôt bien fait : j’ai par exemple le droit de cumuler mon statut de chercheur avec le statut de consultant scientifique pour l’entreprise.
Patrick Collombat
Responsable scientifique du projet DiogenX

Pendant deux heures, ces derniers questionnent l’équipe sur tous les aspects du projet : le plan de développement, le plan de financement, la première maladie identifiée qui sera traitée, les marchés potentiels pour le traitement en développement… 

Le souvenir reste vif dans la mémoire du chercheur : « L’audience était intéressée, même si j’ai reçu quelques coups de griffe sur la partie présentation du projet. Les présentations scientifiques sont différentes des présentations business. Lors d’une présentation business, il faut tout de suite dire ce que l’on propose. Dans les présentations scientifiques, il y a parfois une forme de “suspens académique”, et l’on réserve parfois l’information la plus importante pour la fin de l’intervention. » Ce temps d’échanges permet de révéler les quelques failles subsistantes du projet, notamment sur la partie business plan, jugée un peu courte. Mais le projet Diogen X convainc sur l’essentiel, au point de soulever l’intérêt de deux investisseurs présents dans l’audience, ce qui accélère encore le calendrier de développement de la jeune société. Une troisième enveloppe de maturation financée par Inserm Transfert permet de faire la transition avant le déblocage des premiers fonds d’investisseurs et d’approfondir le volet du projet portant sur la régénération des cellules béta du pancréas.

De chercheur à entrepreneur

En parallèle, Patrick Collombat poursuit le parcours pré-entrepreneurial avec Inserm Transfert, et au terme d’une année seulement, le projet Diogen X passe du statut de projet précoce au rang de société établie et financée. 

Le but est de sensibiliser le chercheur aux notions propres à la création d’entreprise en santé humaine. Pour se familiariser avec cet univers, Patrick Collombat participe à des séances de mentorat 2h par semaine pendant plusieurs mois. Il assiste également aux sessions d’accompagnement qu’organise Inserm Transfert.

L’objectif du parcours est de faire des chercheurs des fondateurs d’entreprise éclairés. Concrètement, nous aidons le chercheur à trouver les profils adéquats pour compléter son équipe, à construire son plan de développement. Nous expliquons ce qu’est un produit au sens commercial, comment fonctionne le marché en santé.…
Pauline Solignac
Responsable du programme Entrepreneuriat d’Inserm Transfert

La force du projet repose sur la complémentarité des compétences et la communication entre les partenaires. Comme l’explique Pauline Solignac : « les études de la Banque publique d’investissement (BPI) et notre expérience confirment que ce n’est pas seulement la qualité scientifique d’un projet, mais également l’équipe qui peut faire la différence entre la réussite et l’échec ». Une alchimie qui fonctionne dans le cadre de DiogenX : si la partie business est gérée par Benjamin Charles et la partie science par Patrick Collombat, chaque partie prend le temps de s’expliquer les choses afin de faire converger deux langues différentes, deux métiers différents vers le succès de l’entreprise. L’expérience des partenaires est également un critère de réussite selon Patrick Collombat : « nous nous sommes entourés de consultants, notamment issus de l’entreprise Roche, qui possèdent un réseau dense et qualitatif construit sur plus de 20 ans. Ils peuvent nous orienter vers la bonne personne dès le départ. C’est primordial, pour avoir une chance de voir le projet aboutir. »

Essais cliniques

Avec une levée de fonds globale estimée à 33,5 millions d’euros, le projet est déjà un succès sur le plan entrepreneurial. Cependant l’équipe de DioGenX reste lucide et concentrée sur les prochaines étapes, notamment la phase 3 des essais cliniques, prévue pour 2026. Cette étape demande de tester le traitement sur une cohorte de patients et représente un coût financier colossal.

De son côté, l’équipe support d’Inserm Transfert maintient son soutien, par exemple dans le cadre de la négociation d’éventuelles licences. Comme le rappelle Patrick Collombat : « maintenant, le but du jeu est d’aller le plus loin possible avec notre molécule afin de démultiplier son champ d’applications et pouvoir soigner le maximum de personnes. » Inserm Transfert se tient également prêt à réagir en cas d’attaque en contrefaçon.

Malgré une proposition thérapeutique abordée très en amont de la phase de valorisation, la solidité du trio constitué par Patrick Collombat, Benjamin Charles et Jean-Pascal Tranié, cumulée à une bonne science a convaincu les investisseurs. Et le chercheur du groupe ne regrette rien : « ces dernières années ont été très enrichissantes. Honnêtement, cela me plaît beaucoup. J’apprends un second métier, j’évolue vers d’autres choses. Et cela enrichit mon quotidien de recherche de nouvelles questions comme par exemple comment valoriser telle ou telle recherche sur un plan thérapeutique. Avant, je cherchais à comprendre comment je pouvais “potentiellement aider les diabétiques”. Maintenant je pense à des solutions concrètes. Cela me fait penser différemment à la science que je mets en œuvre. »