Comment décririez-vous la situation en matière d’égalité à l’Inserm ?
Laëtitia Le Balc’h : Je dirais que l’on peut faire mieux. Bien que le domaine des sciences de la vie et de la santé soit attractif pour les femmes, et que les effectifs de l’Inserm soient majoritairement féminins, la proportion des femmes diminue au fur et à mesure qu’on s’élève dans la hiérarchie.
Damien Rousset : En effet. Ce diagnostic est posé depuis plusieurs années à l’Inserm, et les chiffres sont parlants : dans le corps des chargés de recherche, les femmes représentent plus de la moitié des effectifs (52 %), mais elles ne sont plus que 39 % dans le corps des directeurs de recherche. Même constat dans la population d’ingénieurs et techniciens. Si les femmes représentent 69 % des effectifs, elles ne sont plus que 58 % dans le corps des ingénieurs de recherche. Cette structuration genrée, et les inégalités qui en découlent, ont des conséquences sur la mixité des fonctions occupées, sur le développement professionnel ainsi que sur les rémunérations. Des actions doivent être prises pour corriger ce déséquilibre et garantir un égal accès aux perspectives de carrière pour tirer parti de tous les talents disponibles. C’est tout l’objet du plan pour l’égalité professionnelle.
Déjà, 170 correspondants égalité dans les structures s’investissent pour relayer la politique de l’Institut.
La mise en œuvre du plan repose sur une action institutionnelle et collective forte. Où en est-on ?
D. R. : L’égalité professionnelle est un enjeu stratégique qui nécessite l’implication de tous, et en particulier une responsabilisation des manageurs. C’est pourquoi nous avons décidé que le premier pilier du plan reposerait sur l’engagement de tous les responsables de structure. Ainsi, chacun d’entre eux est invité à signer une lettre d’engagement en faveur de la politique pour l’égalité professionnelle de l’Inserm, qui permet de décliner la politique de l’établissement en tenant compte des spécificités de la structure considérée.
L. L. B. : Au siège, le PDG et l’ensemble des directeurs et des directrices ont signé cette lettre d’engagement. La démarche est en cours parmi les directeurs et directrices d’unité qui sont, à cette date, près de 20 % à l’avoir signé. L’action institutionnelle s’appuie également sur la mobilisation des correspondants égalité nommés au sein de chaque structure. Le réseau est en train de se constituer, ils sont aujourd’hui près de 170.
D. R. : Le rôle des correspondants égalité est essentiel, parce qu’ils sont le relais de notre politique en matière d’égalité professionnelle, au plus près des collectifs de travail, et qu’ils sont force de propositions et d’initiatives adaptées. J’en profite pour les remercier de leur investissement et de leur détermination à faire progresser l’égalité femmes-hommes au sein des structures de l’Inserm.
Si cette phase d’acculturation ne produisait pas les effets attendus, nous n’hésiterions pas à envisager des mesures plus contraignantes.
Quelles sont les premières actions engagées ?
L. L. B. : La diffusion générale de notre politique va s’accentuer avec le déploiement partout dans nos laboratoires d’un kit de communication pédagogique, constitué d’affiches et d’une présentation Powerpoint, pour rappeler les messages clés qui sous-tendent la démarche de l’Institut. Les autres actions engagées portent sur la conception de formations en e‑learning pour acculturer l’ensemble de la communauté aux biais et stéréotypes de genre, en faire prendre conscience, et atténuer leur influence négative sur la qualité des relations sociales et professionnelles et sur l’égalité des chances.
D. R. : Je reviens sur l’égalité des chances. Lutter contre les inégalités dans les processus de sélection et d’évaluation est un objectif fort du plan. Désormais, chaque comité de sélection qui a un effet sur la carrière de nos agents (conseil scientifique, commissions scientifiques spécialisées, réunions d’analyse nationales, jurys de concours…) sera pourvu d’une fonction (tenue par l’un de ses membres) de garant des principes de l’égalité des chances et des bonnes pratiques en matière de parité. Si une phase d’acculturation aux enjeux de l’égalité professionnelle est indispensable dans une organisation telle que l’Inserm, nous en ferons rapidement le bilan et, si les effets qui en sont attendus tardaient à se manifester, nous n’hésiterions pas à envisager des mesures plus contraignantes.