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Portrait de Jean-Luc Teillaud rédacteur en chef de médecine/sciences

« médecine/sciences est la seule revue pluridisciplinaire en français consacrée à la recherche biomédicale »

Jean-Luc Teillaud a été reconduit à la direction en chef de la revue de l'Inserm médecine/sciences. À cette occasion, il revient sur la genèse et l’évolution de ce titre, et affirme son attachement à l'open access.

National
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Pouvez-vous vous présenter ?

Jean-Luc Teillaud : Après un post-doctorat à New York au début des années 1980, j’ai travaillé sur l’immunothérapie des cancers à l’institut Curie à Paris au sein de l’unité Inserm 255. Parallèlement, j’ai créé en 1991 le Laboratoire de biotechnologie des anticorps. J’ai ensuite dirigé une équipe du centre de recherche des Cordeliers, pour travailler sur l’effet vaccinal des anticorps anti-tumeurs. À présent, au Centre d’immunologie et de maladies infectieuses, j’étudie le fonctionnement des structures lymphoïdes tertiaires, qui jouent un rôle clé dans la survie des patients atteints de tumeurs solides.

J’ai intégré le comité éditorial de médecine/sciences en 2010, après avoir coordonné un numéro thématique sur les anticorps monoclonaux, avec Hervé Watier et Alain Beck. Puis en 2017, j’ai succédé à Hervé Chneiweiss au poste de rédacteur en chef. Je pense être le premier rédacteur en chef scientifique, et non médecin, de la revue. Aujourd’hui, je suis entouré d’une petite équipe éditoriale. Elle comprend Thierry Jouault, rédacteur en chef adjoint ; Jean-Pierre Hardelin, adjoint à la rédaction ; et François Flori, secrétaire général de la rédaction. Pour réaliser les numéros, nous sommes également accompagnés par Suzy Mouchet et, plus récemment, Michel Pohl, qui représentent l’Inserm ; ainsi que par notre directrice éditoriale, Martine Krief-Fajnzylberg.

Le comité éditorial de la revue est composé de scientifiques et de médecins provenant d’horizons divers, y compris de la philosophie et de l’économie de la santé, qui jouent évidemment un rôle essentiel dans le choix des thèmes abordés.

Racontez-nous la genèse de médecine/sciences.

J.-L. T. : médecine/sciences est une revue scientifique généraliste, dédiée à la biologie, à la médecine et aux questions de santé, dans son acception la plus large. Elle vise à promouvoir la recherche biomédicale en langue française. La revue a été lancée en 1985 à l’initiative du ministère français de la Recherche et du ministère des Relations internationales de la province du Québec. Ce projet a été porté par l’Inserm et son directeur général d’alors, Philippe Lazar, et soutenu fortement par plusieurs grands cliniciens et scientifiques français.

En 2006, les gouvernements français et québécois ont transféré la responsabilité de la revue, qui est devenue la propriété de l’Inserm. Son directeur de publication actuel est le PDG de l’Inserm, Gilles Bloch. Son hébergement et sa production sont assurés par les éditions EDP Sciences, qui soutiennent fidèlement la revue depuis de nombreuses années. Soulignons enfin que le Fonds de recherche du Québec-Santé (FRQS), l’un des membres fondateurs, soutient la revue pour sa diffusion aux chercheurs et médecins québécois.

Quels sont les objectifs de la revue ?

J.-L. T. : médecine/sciences prône la défense de la langue française. Dans un univers scientifique dominé par l’anglais, c’est la seule revue francophone dans les domaines de la biologie et de la recherche médicale qui dispose d’une certaine visibilité et d’une grande reconnaissance scientifique. Elle est d’ailleurs indexée dans des bases internationales comme PubMed ou Google Scholar. L’autre ambition de notre mensuel est de faire dialoguer la science fondamentale et la médecine. Par ailleurs, notre revue bénéficie d’une bonne image auprès de la communauté scientifique et médicale. Nous avons très peu de refus de la part des chercheurs et cliniciens que nous sollicitons. Ce sont toutes ces raisons qui m’ont motivé à en accepter la rédaction en chef.

Quelle est votre ligne éditoriale ?

J.-L. T. : Nous cherchons à maintenir un équilibre entre science fondamentale, science translationnelle et recherche tournée vers la clinique. Nous mettons en avant l’intégrité et l’éthique, et nous ouvrons nos colonnes à la pluralité de la recherche et à ses controverses. Je tiens notamment beaucoup à la contribution de nos collègues des sciences humaines et sociales. Par exemple, pour la série d’articles que nous avons publiés sur la loi de bioéthique, nous avons fait appel à des juristes et à des sociologues. Cette année, nous prévoyons de sortir une série d’articles sur les recherches menées en matière de contraception. Avec les cliniciennes chercheuses qui ont accepté d’en assurer la coordination, nous traiterons les aspects scientifiques, mais aussi économiques et sociétaux de ces recherches.

Au sein de notre comité éditorial, qui se réunit tous les deux mois, nous avons la chance de compter sur la présence des philosophes Marie Gaille et Anne-Marie Moulin ; de Jacques Haiech, préoccupé par les questions d’intégrité scientifique et de bioéthique ; ainsi que de l’économiste Carine Franc.

Comment choisissez-vous les sujets ?

J.-L. T. : Le choix des sujets fait l’objet d’un dialogue ouvert au sein du comité éditorial. Pour les numéros classiques, chaque membre envoie ses suggestions en amont des réunions, et nous décidons ensemble de l’intérêt et du format des articles. Pour les séries, nous identifions des coordonnateurs. Par exemple, l’ophtalmologue Francine Behar-Cohen, directrice d’équipe Inserm, a supervisé notre série consacrée à la rétine. Récemment, Thierry Jouault, et Philippe Charlier, médecin légiste, archéo-anthropologue et paléopathologiste français, ont coordonné le numéro thématique consacré au vieillissement et à la mort, cellulaire ou celle des organismes. Le prochain numéro thématique, coordonné par Paul Czernichow, sortira en mai et portera sur les diagnostics périnataux. Je tiens à souligner qu’en quatre ans, avec toute l’équipe, nous n’avons jamais renoncé à un thème, si difficile soit-il à coordonner.

Parlez-nous du travail de la formation à l’écriture avec les étudiants.

J.-L. T. : médecine/sciences est une formidable source d’information en biologie et en médecine pour les étudiants francophones. Laure Coulombel puis Sophie Sibéril ont engagé des partenariats avec des mastères d’universités françaises. Les enseignants de ces mastères utilisent médecine/sciences comme outil de formation, pour l’écriture de brèves et de nouvelles. Les étudiants choisissent un article publié dans une revue internationale, qui porte sur un thème lié à leur mastère, et se regroupent en ateliers pour écrire un texte en analysant et en mettant en perspective le travail publié. Les équipes pédagogiques et l’équipe éditoriale de la revue les assistent et procèdent à des relectures croisées. Une fois le manuscrit validé, il est publié dans la rubrique « Nos jeunes pousses ont du talent ».

C’est un travail interactif, collégial et très formateur pour les étudiants. Il leur permet d’extraire la quintessence d’un article, et d’en rendre compte en français, sous une forme concise. Cet exercice est entré dans la grille d’évaluation de la plupart des mastères avec lesquels nous travaillons.

Avec la demande grandissante des mastères, nous réfléchissons à augmenter le nombre de ces publications, notamment grâce au site web. Ce travail d’éducation à l’écriture fonctionne très bien avec les mastères, et nous espérons aussi collaborer avec des écoles doctorales.

Comment la rédaction s’est-elle mobilisée durant cette année de pandémie ?

J.-L. T. : Même si nous avons décidé de ne pas délaisser les autres domaines de recherche, la pandémie mobilise fortement notre rédaction. Sur notre site web, nous mettons en ligne les articles sur la Covid-19 et le SARS-CoV‑2 dès leur acceptation, avant de les publier dans les prochains numéros papier. Cela permet aux lecteurs d’accéder rapidement aux contributions des cliniciens et des chercheurs. Une dizaine d’articles sont actuellement en ligne. Ils portent aussi bien sur des questions scientifiques touchant au virus que sur l’urgence des réformes institutionnelles en santé mondiale, sur l’éthique des essais thérapeutiques, ou sur les protocoles de soin et de recherche. Dans les prochains mois, nous souhaitons publier des articles sur les impacts sociologiques et éthiques de la pandémie. Mais cela demande encore du recul… Je consacre également mon éditorial de janvier à la crise sanitaire, aux questions qu’elle a soulevées, et aux dérives auxquelles elle a conduit.

Quel a été l’impact de l’open access sur médecine/sciences ?

J.-L. T. : L’open access a été formidable pour notre revue. Nous sommes passés de 300 000 à plus de deux millions de téléchargements d’articles par an. Nous avons une large audience en France et dans les pays francophones comme l’Algérie, le Canada, la Belgique, le Maroc, la Suisse, ainsi que d’autres pays africains, et même aux États-Unis ! Le modèle économique des revues à souscription repose sur des abonnements extrêmement coûteux. C’est un marché où les marges sont très importantes pour les grands éditeurs. Je crois à de nouvelles règles du jeu et à l’émergence de modèles alternatifs grâce à l’open access. L’accord national signé par EDP Sciences avec Couperin (Consortium unifié des établissements universitaires et de recherche pour l’accès aux publications numériques) a permis à la revue d’élargir considérablement son audience.

Les chiffres-clés

  • Tirage papier : 600 exemplaires
  • Nombre de numéros par an : 10 numéros dont deux doubles et un ou deux numéros hors-série
  • Nombre de téléchargements : plus de 2 millions en 2020
  • Prix : 25 euros par numéro