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La cohorte Constances mobilisée sur le Covid-19

​Le projet Sapris est destiné à recueillir des données indispensables aux chercheurs pour informer les pouvoirs publics chargés de la lutte contre le Covid-19. La cohorte Constances ainsi que cinq autres cohortes y participent. Retour sur les objectifs et l’avenir de la plus grande cohorte française avec Marie Zins, directrice de l'unité Cohortes épidémiologiques en population à l'hôpital Paul-Brousse de Villejuif.

National
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Pouvez-vous présenter vos activités ?

Marie Zins : Je suis médecin épidémiologiste, professeure de santé publique à l’université de Paris et je dirige l’unité Inserm Cohortes épidémiologiques en population. Je travaille principalement sur deux cohortes : Gazel et Constances. La première a été mise en place en 1989 par l’Inserm, en coopération avec plusieurs services d’EDF-GDF. La cohorte Constances est quant à elle une infrastructure de recherche financée dans le cadre des programmes d’investissements d’avenir. Elle a la particularité d’être généraliste, c’est-à-dire de s’intéresser à des problèmes de santé et à des déterminants très divers et d’être composée de personnes en bonne santé. Elle est constituée d’un échantillon représentatif de plus de 200 000 adultes âgés de 18 à 69 ans. C’est un record inégalé qui fait de Constances le plus important projet de recherche d’épidémiologie et de santé publique en France.

En ma qualité de responsable scientifique et technique des cohortes, mon rôle est de gérer et de rassembler la communauté, d’assurer l’animation scientifique, d’améliorer les bases de données et d’identifier les grands axes de recherche du futur.

La santé publique est considérée comme le parent pauvre de la santé. Pourtant, travailler sur beaucoup de pathologies, tant en biomédical qu’en sciences humaines et sociales est passionnant. Avec les scandales sanitaires de ces dernières années (celui du Mediator par exemple) et les épidémies, je trouve que c’est un acte citoyen d’investir ce domaine de recherche. 

Quels sont les grands axes de recherche de Constances ?

M. Z. : Le projet Constances, mené grâce à la participation des Caisses primaires d’assurance-maladie (CPAM) et des centres d’examens de santé, fait l’objet d’un partenariat entre l’université Paris-Saclay, l’université de Paris, l’Inserm, la Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM), la Caisse nationale d’assurance-vieillesse (CNAV) et le ministère de la Santé (direction générale de la santé). Je travaille avec un collectif multidisciplinaire composé de chercheurs, de biostatisticiens, de cliniciens, de vidéo-codeurs, d’administratifs, de neuropsychologues mais également avec de nombreux prestataires, dont certains prestigieux comme l’Imprimerie nationale. Nous avons aussi un conseil scientifique international qui évalue les projets et fait un travail de relecture, parfois en liaison avec les chercheurs pour améliorer la qualité des projets. Que ce soit au sein des équipes de travail ou de la cohorte elle-même, l’humain est donc véritablement au cœur du dispositif !

Constances a pour objectif de suivre la santé des volontaires sur le long terme afin de mieux comprendre les facteurs qui l’influencent avec un focus sur le vieillissement, les inégalités sociales de santé, les conditions de travail ou encore la santé des femmes. Elle étudie aussi les déterminants environnementaux et les expositions que subit l’organisme comme la pollution de l’air ou les produits chimiques.

Nous mettons également en place une biobanque : depuis avril 2019, près de 900 000 aliquots d’urine, de plasma, de sérum et de couche leuco-plaquettaire provenant de 34 500 volontaires sont stockés dans la biobanque de Constances, à l’Integrated BioBank of Luxembourg.

Constances consiste donc en une énorme base de données et un grand instrument de recherche pour la communauté scientifique : plus de 190 chercheurs venant de tous horizons (Europe, Royaume-Uni, Canada, États-Unis…) travaillent sur nos données.

Comment Constances s’est-elle repositionnée avec l’arrivée du Covid-19 ?

M. Z. : L’épidémie de Covid-19 constitue un très grand enjeu épidémiologique. L’Inserm, en collaboration avec Santé publique France, a lancé le programme Sapris (Santé, perception, pratiques, relations et inégalités sociales en population générale pendant la crise Covid-19), coordonné par Nathalie Bajos, directrice de recherche Inserm, et par Fabrice Carrat, professeur de santé publique à Sorbonne Université. Avec quatre autres grandes cohortes françaises (E3N/E4N, NutriNet-Santé et les cohortes d’enfants Elfe et Epipage), nous nous sommes mobilisés afin d’identifier les enjeux pluridisciplinaires (biocliniques et sociaux) liés à cette épidémie.

Avec ce groupe mixte et des experts des maladies infectieuses, nous avons mis au point un questionnaire le plus harmonisé possible entre les cohortes. Ainsi, nous allons pouvoir recueillir des données essentielles sur beaucoup de thèmes comme la situation et l’évolution du nombre de personnes atteintes, les effets du confinement, la santé mentale, l’acceptation des mesures barrières, le sommeil, la prise en charge des enfants et les dynamiques égalitaires ou inégalitaires au sein des foyers… Nous pourrons aussi mesurer la confiance envers les pouvoirs publics et les recours au système de santé. Ce questionnaire a été adressé, début avril, à 70 000 volontaires de Constances avec 72 % de participation. En tout, sur les cinq cohortes, 110 000 volontaires ont répondu. Un deuxième questionnaire, plus bref, a été envoyé début mai, afin de suivre l’évolution en temps réel. Enfin, un troisième sera diffusé fin juin sur le thème du déconfinement. 

En parallèle, sous la houlette du Pr Fabrice Carrat, spécialiste en épidémiologie des virus, et des responsables des cinq cohortes, nous avons lancé le volet Sapris-Sero. Il s’agit d’une recherche qui vise à évaluer la part de la population qui a déjà été en contact avec le coronavirus. En complément des questionnaires sur le Covid-19 et le confinement, les volontaires ont donc reçu un kit d’auto-prélèvement sérologique. Pour Constances, 8 000 kits ont déjà été proposés à des volontaires ayant validé leur premier questionnaire Covid-Constances et tirés au sort en fonction de leur lieu de résidence et de certaines caractéristiques sociodémographiques. Ces échantillons, stockés dans un premier temps au sein de la fondation Jean-Dausset — Centre d’étude du polymorphisme humain (CEPH) à Paris, seront ensuite analysés au laboratoire de virologie de la faculté de Marseille dirigé par le Pr. Xavier de Lamballerie.

C’est la première fois que les cohortes travaillent ainsi main dans la main. Je trouve cette collaboration entre disciplines et outils très enthousiasmante. 

Constances étant une infrastructure nationale, en accord avec les règles de fonctionnement de la cohorte, les données seront accessibles à la communauté de recherche française et internationale publique et privée.

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