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Julien Barc reçoit le prix Descartes-Huygens pour ses travaux sur la mort subite

​Julien Barc, chercheur Inserm à l'institut du thorax de Nantes, reçoit le prix scientifique franco-néerlandais Descartes-Huygens, pour ses recherches sur les origines génétiques de la mort subite cardiaque de l'adulte. ​

National
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Julien Barc : Biologiste de formation, j’ai effectué ma thèse sur les bases moléculaires des arythmies cardiaques à l’institut du thorax à Nantes. En 2010, j’ai rejoint le département de cardiologie expérimentale de l’Academic Medical Center d’Amsterdam aux cotés de Connie Bezzina et d’Arthur Wilde.

Ce post-doctorat aux Pays-Bas m’a permis d’acquérir une expérience forte dans les nouvelles technologies et les approches en génétique. Ces cinq années de mobilité ont renforcé la collaboration bilatérale entre les deux laboratoires. Cela s’est traduit par le développement de programmes de recherche de grande ampleur et la publication de neuf articles. L’ambition aujourd’hui est de faire perdurer ce partenariat en y ajoutant notamment des programmes d’échanges d’étudiants.

Depuis 2014, je suis rentré à Nantes où j’exerce actuellement en tant que chargé de recherche à l’institut du thorax. Avec mon groupe, je mène des recherches sur les approches génétiques et épigénétiques cardiaques. J’ai la chance de travailler dans une équipe multidisciplinaire composée de cardiologues, de bioinformaticiens, de biostatisticiens et de biologistes qui me permettent de mener des études translationnelles. L’institut du thorax inclut un centre de référence national pour les arythmies héréditaires (CHU de Nantes) qui permet d’étudier une des plus grandes bases données mondiales de patients souffrant de maladies rares cardiaques héréditaires comme le syndrome de Brugada.

Pourquoi la mort subite cardiaque de l’adulte ?

Julien Barc : Chaque année, on recense 400 000 morts subites cardiaques de l’adulte en Europe, dont 40 000 en France. Les trois-quarts de ces décès surviennent chez des individus qui ne présentaient pas de symptômes avant-coureurs. Le défi est d’identifier les marqueurs biologiques des facteurs de risque pour permettre une médecine prédictive.

Sur ces 40 000 décès : 80 % sont dus à un infarctus du myocarde, 10 % à une anomalie structurale du cœur et 10 % à des anomalies électriques. Cette dernière catégorie m’intéresse plus particulièrement. Elle concentre des patients de moins de 45 ans qui sont moins exposés aux risques cardiovasculaires, mais qui présentent une forte composante héréditaire.

Suivre ces patients permet d’identifier les mécanismes moléculaires et les facteurs de risque génétiques. Ces facteurs ont été testés sur d’autres pathologies cardiaques fréquentes et plus complexes. Ils démontrent la pertinence de l’étude de ces maladies rares comme modèle.

Pouvez-vous décrire les travaux récompensés par le prix Descartes-Huygens ?

Julien Barc : Grâce à notre collaboration bilatérale, nous avons identifié de nouveaux gènes et de nouveaux mécanismes à l’origine de pathologies à risque de mort subite cardiaque.

À la fin des années 2000, c’est à l’Academic Medical Center d’Amsterdam que j’ai découvert le séquençage de nouvelle génération qui permet d’analyser tous les gènes du génome humain en une semaine ! Grâce à cette technologie de pointe, nous avons identifié de nouveaux gènes impliqués dans les arythmies cardiaques.

Jusque-là, nous associions une maladie rare à des variations génétiques rares. Nous avons proposé un nouveau paradigme en montrant que l’accumulation de variations fréquentes chez des patients atteints du syndrome de Brugada pouvait aussi augmenter fortement le risque de développer la maladie.

Aujourd’hui, en plus des gènes, nous pouvons analyser les parties non-codantes qui représentent 98 % de l’ADN, ainsi que l’ensemble du spectre des variations génétiques, des plus rares aux plus fréquentes. Ceci se fait grâce au séquençage du génome entier que nous sommes en train d’appliquer aux patients atteints du syndrome de Brugada. La collaboration entre la France et les Pays-Bas permettra d’analyser ces données ensemble et de maximiser la puissance de l’étude.

Nous cherchons comment identifier les marqueurs de risque biologiques pour mieux prévenir la mort subite de l’adulte. Ainsi, nous pourrons accélérer le diagnostic et explorer la progression et les mécanismes des maladies rares cardiaques, dans le but d’allier le score génétique et clinique. Ce sera un progrès pour la médecine préventive et personnalisée.

credit_-stephane-bellanger-_-l'institut-du-thorax_redux.jpgCrédit photo : Stéphane Bellanger, l’institut du thorax

Qu’avez- vous ressenti lorsque vous avez appris que vous étiez lauréat du prix Descartes-Huygens ?

Julien Barc : Bien que je ne fasse plus partie du laboratoire, l’Academic Medical Center d’Amsterdam a proposé ma candidature. Lorsque le président de l’Académie royale des lettres et des sciences des Pays-Bas m’a téléphoné pour m’annoncer que j’étais lauréat, j’ai été très touché. C’est un bel aboutissement pour notre travail collectif.

Grâce à cette récompense, je pourrais séjourner plus longtemps aux Pays-Bas pour intensifier cette collaboration. Je souhaite offrir à mes étudiants la possibilité de découvrir un autre environnement scientifique et un autre fonctionnement de la recherche.

Ce prix revêt une dimension toute particulière. Denis Escande – co-fondateur de l’institut du thorax, connu pour ses travaux sur l’électrophysiologie cardiaque, décédé en 2006 – a reçu le Prix Descartes-Huygens en 1996. Arthur Wilde, fondateur du département de cardiologie expérimentale à Amsterdam, l’a reçu en 2009. 

Quel conseil donneriez-vous à un jeune qui veut se lancer dans la recherche ?

Julien Barc : C’est une discipline qui demande de l’engagement et de la passion. La curiosité reste probablement le maître-mot. Ainsi que l’anticipation. Il faut choisir judicieusement ses projets et ses sujets de recherche, et trouver le laboratoire le plus adapté pour les mener à bien.

Ce métier peut s’exercer dans tous les pays du monde, ce qui implique aussi une concurrence internationale. E​ncore plus aujourd’hui, les jeunes chercheurs ne doivent pas avoir peur d’aller gagner de l’expérience à l’étranger et pourquoi pas y faire carrière. C’est un véritable challenge de conserver l’attractivité de nos postes de chercheurs en France, de faire revenir nos talents mais aussi d’attirer les talents étrangers.

Le prix Descartes-Huygens

Depuis 1995, le prix scientifique Descartes-Huygens est décerné à des chercheurs de toutes les disciplines par l’Académie royale des lettres et des sciences des Pays-Bas, et pour la France, par le ministère des Affaires étrangères et européennes et le ministère de l’Ens​eignement supérieur et de la Recherche.


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