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Microbes et machines : les avancées scientifiques de 2020 (4/5)

Il n'y a pas que le SARS-CoV-2 ! En 2020 les équipes spécialisées en immunologie, inflammation, infectiologie et microbiologie ont continué de relever les défis propres à leur domaine. Dans le même temps, les unités de l'Inserm ont mis au point des technologies toujours plus sophistiquées, pour accompagner la recherche et pour soigner. Tour d'horizon en huit faits marquants.

National
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Un vaccin contre le paludisme efficace pour les femmes enceintes

Benoît Gamain Unité 1134 Inserm/Université de Paris/ Université Antilles-Guyane, Biologie intégrée du globule rouge

Le paludisme représente un problème de santé publique majeur dans les régions où la maladie est endémique. En effet, la santé des femmes enceintes et de leur enfant à naître est particulièrement à risque. Cette maladie infectieuse est notamment associée à un faible poids de naissance et à un sur-risque de mortalité néonatale. Hélas à ce jour, les stratégies préventives et thérapeutiques restent inadaptées et tardives. Pour protéger cette population sensible, une équipe de chercheurs de l’Inserm et de l’Université de Paris, dirigée par Benoît Gamain, développe un vaccin spécifique, Primvac. Les premiers résultats de l’essai clinique sont prometteurs : le vaccin n’a provoqué aucun événement indésirable grave chez les 68 femmes vaccinées. Les résultats confirment également qu’il est immunogène et induit une production d’anticorps chez 100 % des femmes vaccinées. Ces derniers sont fonctionnels puisqu’ils sont capables de se fixer à la surface des globules rouges infectés et d’inhiber leur capacité adhésive, responsable de leur accumulation dans le placenta et de la maladie. Une avancée capitale !

Parasites Plasmodium du moustique anophèle exprimant la protéine de fluorescence GFP. © Inserm/Marina Lamacchia
Chaque année, le paludisme touche des centaines de millions de personnes et en tue plus de 400000. La moitié de la population du globe y est exposée. 
Benoît Gamain


Histoires d’eaux

Marie-Cécile Ploy Unité 1092 Inserm / Université de Limoges / CHU Limoges, Anti-infectieux : supports moléculaires des résistances et innovations thérapeutiques (Resinfit)

Bdellovibrio est une bactérie qui se rencontre dans l’environnement aquatique et dans le sol. Ce sont des bactéries tueuses de bactéries Gram négatif qui pourraient lutter contre la résistance croissante aux antibiotiques. © Inserm/Henri Leclerc

La résistance aux antibiotiques constitue aujourd’hui l’une des plus graves menaces qui pèsent sur la santé mondiale. Les eaux usées, malgré de nombreux traitements, contribuent à la dissémination de polluants chimiques et de souches microbiennes susceptibles de favoriser cette résistance. À ce titre, les effluents issus de l’activité hospitalière sont particulièrement préoccupants. Dans l’optique d’éclairer leurs effets environnementaux, l’équipe dirigée par Marie-Cécile Ploy de l’université de Limoges a caractérisé les bactéries (microbiome) et les gènes de résistances (résistome) qui s’y trouvent. Résultats : les eaux usées hospitalières affichent des signatures spécifiques, stables dans le temps, distinctes des eaux usées urbaines. On y trouve plus de gènes résistants aux antibiotiques, corrélés à une abondance en tensioactifs, antibiotiques et métaux lourds qui sont utilisés pour lutter contre les pathogènes. Révélatrice du contexte hospitalier, cette différence ne pose pas pour autant un risque identifié. La singularité des eaux hospitalières est diluée et masquée par l’activité urbaine lorsque les eaux usées se mélangent avant d’être traitées dans les stations d’épuration.

La dernière classe d’antibiotiques, les lipopeptide a été découverte il y a plus de 30 ans, en 1987. 
Marie-Cécile Ploy


Une infection peut en cacher une autre

Jérémie Poschmann Unité 1064 Inserm / Université de Nantes

Il n’est pas rare qu’une inflammation primaire provoquée par un traumatisme ou un sepsis entraîne une infection secondaire à l’hôpital : c’est la fameuse infection nosocomiale, causée par une paralysie des défenses immunitaires après la première attaque. Les équipes nantaises d’Antoine Roquilly du CHU et de Jérémie Poschmann du Centre de recherche en transplantation et immunologie et celle de Jose Villadangos de l’université de Melbourne en Australie ont découvert que lors de la résolution de la première infection, des signaux immunosuppresseurs sont envoyés au niveau local. Les macrophages résidents, qui normalement neutralisent et phagocytent les bactéries, subissent alors une reprogrammation épigénétique qui les rend inactifs. Chez l’humain, macrophages alvéolaires et monocytes circulants voient leur capacité de phagocytose diminuée pour au moins 6 mois. Les chercheurs montrent que la protéine SIRPα joue un rôle critique dans l’établissement de ce microenvironnement. La bloquer in vitro grâce à des anticorps permet de restaurer les cellules immunitaires de patients gravement malades à leur état initial. Cette stratégie thérapeutique pourrait aider à prévenir de nombreuses infections nosocomiales, responsables de près de 4000 décès chaque année en France.

Globule blanc interagissant avec une souche résistante
aux antibiotiques de la bactérie Staphylococcus
aureus. © NIAID
Environ 6 à 7 % des patients qui séjournent à l’hôpital contractent une infection au sein de l’établissement. Cela représente près de 750000 cas chaque année sur 15 millions de patients. 
Jérémie Poschmann


Lumière sur les séquelles d’Ebola

Yves Lévy Unité 955 Inserm / Université Paris Est Créteil Val de Marne, Institut Mondor de recherche
biomédicale

Coupe transversale d’une particule du virus Ebola (illustration)
© David S.Goodsell/Wellcome Images/Research collaboratory for Structural Bioinformatics

Le virus Ebola est responsable d’une fièvre hémorragique mortelle pour 50 à 90 % des malades. Les survivants gardent des séquelles persistantes de l’infection, notamment une fatigue généralisée, des douleurs musculo-squelettiques, ou encore des troubles oculaires. Pour la première fois, une étude menée par Yves Lévy, à l’Institut de recherche vaccinale à Créteil, s’intéresse au profil immunoinflammatoire des survivants d’Ebola. L’étude montre que près de deux ans après avoir été guéris, et alors que toute trace du virus a disparu de leur organisme, ces individus présentent un profil immunitaire particulier. Celui-ci est caractérisé par la persistance d’anticorps et des lymphocytes T spécifiques du virus. Par ailleurs, il subsiste chez eux des perturbations et une activation des cellules immunitaires et des marqueurs (cytokines et chimiokines) d’inflammation dans le sérum. La persistance de ces stigmates d’inflammation pourrait expliquer les séquelles cliniques à long terme, et sont donc à prendre en compte dans la prise en charge des anciens malades.

Au cours de l’épidémie d’Ebola de 2013 – 2016 en Afrique de l’Ouest, environ
28000 personnes ont été infectées et plus de 11000 d’entre elles sont décédées. 
Yves Lévy


Patients en hibernation

Renaud Tissier Unité 955 Inserm / Université Paris Est Créteil Val de Marne, Institut Mondor de recherche biomédicale

Limiter les séquelles d’un arrêt cardiaque nécessite de maintenir la respiration du patient et de mettre son organisme au repos en le refroidissant le plus rapidement possible, afin de diminuer ses besoins en oxygène. Un défi que la ventilation liquidienne totale (VLT) pourrait relever sous peu. Cette technique consiste à remplir les poumons du patient de perfluorocarbone (PFC), un liquide qui facilite les échanges gazeux (O2 et CO2) avec le sang tout en refroidissant ce dernier. Renaud Tissier de l’École nationale vétérinaire d’Alfort, Philippe Micheau de l’université de Sherbrooke au Canada et la start-up française Orixha viennent de réussir, chez des porcs et des primates non humains, à contrôler finement la VLT, et notamment le volume de PFC à utiliser. Ainsi la température des animaux a atteint 33 °C en 20 minutes, contre 3 à 6 heures avec les techniques habituelles. En outre, leurs poumons n’ont pas été endommagés et cette hibernation ultra rapide a permis de protéger leur cerveau de dommages potentiels. Forts de ces résultats, les chercheurs prévoient d’évaluer cette VLT chez des patients d’ici deux ans. L’objectif : doubler le taux de survie des victimes d’arrêt cardiaque.

Radiographie pulmonaire. © Inserm/Alpha Pict/ Daniel Caro

Tous les ans en France, 40 000 à 46 000 personnes sont victimes d’un arrêt
cardiaque et les deux tiers décèdent. 
Renaud Tissier


Prédire la sévérité d’un lymphome grâce à l’imagerie

Anne-Ségolène Cottereau Unité 1288 Inserm /Institut Curie / Université Paris-Saclay

Architecture cellulaire du lymphome de la peau humaine imagée par microscopie tissulaire à monture entière © Muzlifah Haniffa

Le lymphome diffus à grandes cellules B se caractérise par des foyers cancéreux disséminés dans tout l’organisme. Pour suivre son évolution et la réponse des malades aux traitements, les médecins utilisent l’imagerie, en particulier la TEP-TDM au 18F-FDG (tomographie par émission de positons – tomodensitométrie au 18F-fluorodéoxyglucose). Parmi les données obtenues lors de cet examen, Anne-Ségolène Cottereau, du département de médecine nucléaire de l’hôpital Cochin et du laboratoire d’imagerie translationnelle en oncologie à Paris, a montré que le volume tumoral métaboliquement actif (MTV) et la distance maximale entre deux tumeurs (Dmax) fournissent des valeurs prédictives de la progression de la maladie et de la survie des patients. Quand la MTV et la Dmax sont basses, le risque de rechute l’est aussi, et la chance de survie demeure élevée. Lorsqu’un des paramètres est élevé, le lymphome est plus agressif et le pronostic moins bon. Enfin, ce dernier est mauvais si les deux critères sont élevés. Ces nouvelles informations devraient aider à personnaliser les traitements.

La TEP-TDM, une caméra couplée à un scanner, visualise la répartition dans tout l’organisme du 18F-FDG, un composé administré au patient qui s’accumule dans les cellules cancéreuses proportionnellement à leur activité métabolique. 
Anne-Ségolène Cottereau


Petit guide du système vasculaire cérébral

Nicolas Renier Unité 1127 Inserm / Université Pierre-et-Marie-Curie

À l’image des réseaux neuronaux, le système vasculaire cérébral est doué d’une grande plasticité. Afin de mieux comprendre son organisation, ses liens avec les fonctions neuronales, et à terme d’étudier son rôle dans des maladies neurologiques et psychiatriques variées, l’équipe de Nicolas Renier de l’Institut du cerveau à Paris a mis au point une méthode qui permet de cartographier le système vasculaire cérébral de manière complète, précise, et extrêmement rapide – ici chez la souris. Les chercheurs ont biomarqué les artères sanguines, les veines et les capillaires dans un cerveau optiquement transparent afin d’enregistrer des images 3D par microscopie à feuille de lumière. Les images obtenues, très complexes, collectées sur 20 cerveaux de souris, ont ensuite été traitées de manière automatisée afin de faire apparaître l’organisation des réseaux vasculaires dans différentes zones du cerveau. Cette technique a permis de montrer, à partir d’un modèle d’AVC, une redirection des capillaires sanguins vers le site de l’accident cérébral. Il apparaît également que les régions sensorielles sont parmi les plus densément vascularisées du cerveau, et que la vascularisation des zones auditives est largement diminuée, par exemple, en cas de surdité congénitale.

Accident vasculaire. cérébral © Inserm/U919
Il y a peu, produire une carte du système vasculaire d’un cerveau nécessitait des mois, voire des années et reposait sur des techniques « manuelles ». Grâce à cette méthode, 2 jours suffisent. 
Nicolas Renier


La structure 3D d’une molécule en un clin d’œil

Valérie Gabelica Unité 1212 Inserm / CNRS / Université de Bordeaux

Dans le cerveau de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, on observe des dépôts extracellulaires du peptide amyloïde β (Aβ). © Inserm/Patrizia Giannoni

Nombre de molécules biologiques sont chirales, c’est-à-dire que, comme des gants ou des chaussures, elles existent sous forme de deux structures 3D, images l’une de l’autre dans un miroir, mais non superposables. Or chacune de ces deux conformations spécifiques d’une même molécule influe sur ses interactions avec d’autres molécules ; d’où l’importance de bien les identifier, comme on séparerait le gant droit du gant gauche. L’équipe de Valérie Gabelica du laboratoire ARN : régulations naturelle et artificielle à Bordeaux a mis au point une technique qui permet de distinguer ces conformations dans un mélange de diverses molécules. Cet outil combine deux approches. Grâce à la spectrométrie de masse, les chercheurs identifient les composés présents et, à l’aide d’un laser à lumière polarisée circulaire qui sonde les molécules directement dans le spectromètre, ils établissent leur chiralité, c’est-à-dire sous quelle forme 3D elles se présentent. Entre autres applications, cette technique « 2 en 1 » devrait permettre de déterminer l’impact de l’évolution structurelle d’un petit assemblage de protéines, les bêta-amyloïdes, dans la survenue de la maladie d’Alzheimer, ou encore d’étudier les interactions d’un médicament avec ses molécules cibles.

La thalidomide prescrite aux femmes enceintes dans les années 1960 comme antinauséeux présentait une conformation miroir toxique qui a entraîné de graves malformations chez les nouveau-nés. 
Valérie Gabelica

La semaine prochaine : « Des cellules et des gènes ». Rendez-vous pour huit nouveaux faits scientifiques marquants de 2020 !

Retrouvez toutes les avancées scientifiques du rapport d’activité 2020 de l’Inserm :