Au nombre de 12 pour 2023, ces contrats d’une durée de 3 à 5 ans permettent d’allier activité clinique et activité de recherche grâce à un temps dédié. Ils s’adressent aux praticiens hospitaliers, aux professeurs des universités-praticiens hospitaliers, et aux maîtres de conférences des universités-praticiens hospitaliers.
Le contrat d’interface pour hospitalier prévoit le versement d’une compensation financière d’un montant de 40 000 € permettant le remplacement de l’hospitalier bénéficiaire du contrat pour la partie du temps clinique qui n’est plus assurée (5 demi-journées de vacations).
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Pourquoi avoir décidé de candidater sur l’appel à projets Contrats d’interface ?
Alexandra Aubry : Pendant mes années de médecine, je me suis spécialisée en biologie médicale. J’ai toujours souhaité faire de la recherche, découverte concrètement pendant mon DEA et ma thèse de sciences. L’année de post-doc, durant laquelle, pour la première fois, j’ai pu m’y consacrer à temps plein, m’a confortée dans ce souhait. Cependant, une fois en poste, l’activité hospitalière a pris beaucoup de place et il est devenu difficile d’équilibrer temps passé à l’hôpital et temps de recherche. Ma motivation à postuler au concours pour obtenir un contrat d’interface a été double : souhait personnel de ré-organiser mon temps de travail pour avoir à nouveau une période consacrée à la recherche, et besoin collectif, puisque nous n’avions pas de chercheur temps plein dans l’équipe de recherche à laquelle j’appartenais. J’ai donc proposé à l’équipe d’être cette chercheuse, par l’intermédiaire du contrat d’interface.
Patrick Soussan : Je suis hospitalo-universitaire et ai toujours travaillé dans une unité Inserm, dans l’équipe de Christian Bréchot notamment. Je souhaitais amplifier ma recherche, ce qui nécessitait de prendre un peu de recul sur l’activité hospitalière. Le contrat d’interface m’a permis de m’investir davantage, en parallèle de mes activités d’enseignement.
Pourriez-vous nous dire un mot sur la procédure de sélection ?
A. A. : La première étape repose sur un dossier. Si celui-ci est sélectionné, nous sommes conviés à un oral devant un comité de sélection (comité ad-hoc). Pour ce qui touche au renouvellement de contrat, la procédure est plus simple. La prolongation de contrat est directement évaluée sur la base d’un dossier de candidature.
P.S. : Le dossier était clair sur les attendus. Pour l’oral, j’ai trouvé cela intéressant car les membres du jury venaient d’horizons différents. Je l’ai davantage considéré comme une discussion plutôt que comme un projet à défendre. Le parcours de signatures a été un peu délicat car il a fallu réunir les signatures de personnels Inserm, d’hospitaliers, et de différents membres de l’assistance publique.
Que vous a permis le format offert par le contrat d’interface ?
A. A. : Le contrat a duré 3 ans, et a été renouvelé pour 2 ans. Pendant cette période, j’ai pris la direction de l’équipe de recherche et j’ai pu mener une grande partie des projets que nous souhaitions développer. Ce temps m’a également permis de rechercher et d’obtenir des financements, et de réorganiser l’équipe. Et j’ai recruté un chercheur Inserm à temps plein.
P.S. : J’ai également opté pour un format 3 + 2. Le contrat permet d’aller plus avant sur les questions de fond. Lorsque l’on est à mi-temps, c’est un sprint permanent, car on est attendu sur un grand nombre de thématiques, de formations… Le contrat d’interface m’a permis de faire progresser la recherche sur laquelle je travaille de manière exponentielle. J’ai pu poser le projet et le mettre véritablement en œuvre.
Comment se sont déroulés la fin du contrat et le retour au clinicat ?
A. A. : Je suis revenue à l’activité hospitalière, mais l’expérience acquise durant le contrat m’a permis de conserver un temps pour continuer mon travail de recherche. Ce nouveau positionnement me convient davantage. Pour le retour, je dirais qu’il est important de se préparer : il ne faut pas perdre le contact avec les collègues hospitaliers.
P.S. : Le plus complexe a été la transition avec l’équipe de recherche créée. Durant le contrat d’interface, on construit une équipe, on assure sa coordination ainsi que son pilotage. Après la reprise, le temps que l’on peut lui dédier est forcément moindre. Il faut adapter son fonctionnement.
Quel bilan tirez-vous de cette expérience ?
A. A. : Je suis ravie que l’Inserm propose ce format, car ce temps a été très structurant, notamment pour mon équipe. Avant le temps alloué par le contrat d’interface, nous n’étions pas les mieux positionnés sur le plan recherche au centre. À présent, nous contribuons de façon significative au rayonnement de l’unité, notamment grâce à nos publications et aux financements obtenus. Au niveau personnel, décrocher ce contrat m’a permis d’asseoir ma légitimité, car c’est une forme de reconnaissance. C’est un véritable plus sur le C.V., et le fait d’être « adoubé » par l’Inserm constitue un vrai avantage pour obtenir des financements.
P.S. : Je garde un excellent souvenir de cette période. J’ai fait beaucoup de dossiers, beaucoup d’administratif aussi, mais cela m’a permis de régulariser pas mal de choses. C’est passionnant de se spécialiser encore plus sur certaines thématiques de recherche. En cinq ans, nous devenons expert. Par ailleurs, le fait d’avoir dû envoyer des rapports d’activité régulièrement à l’Inserm est une bonne chose car cela oblige à structurer son travail et à marquer très clairement les étapes .
Un conseil aux futurs postulants ?
A. A. : Intégrer sa demande dans un cadre dépassant le projet individuel. Montrer dans quelle mesure le contrat d’interface va dynamiser l’unité, sa recherche à moyen et long terme. Et proposer une vision construite et ambitieuse des objectifs scientifiques pour l’après. Tant sur le plan des objectifs de recherche que structurels, au niveau de la vie de l’équipe, et de son organisation. En parallèle, ne pas oublier de communiquer auprès de ses collègues hospitaliers et hospitalo-universitaires pour les intégrer au projet. Pour qu’ils comprennent qu’on ne les abandonne pas, et que le contrat d’interface va à terme renforcer l’équipe. En ce qui me concerne, la prise de décision « d’y aller ou pas » a été collective. Cette démarche inclusive a également fluidifié le « l’après », lors de mon retour aux activités hospitalières.
P.S. : Même si tout s’est bien passé, revenir d’un poste d’enseignement et recherche au clinicat peut être assez abrupt si l’on a un peu perdu le lien avec l’Hôpital. ll faut bien se préparer à la reprise.
Quels sont vos prochains objectifs ?
A. A. : Je souhaite que l’on maintienne cette capacité à développer de nouveaux projets et à les financer. Nous avons obtenu deux financements de l’Agence nationale de la recherche (ANR), des programmes hospitaliers de recherche clinique (PHRC), des contrats de recherche clinique (CRC) et sommes partenaires ANR de projets européens. Il nous faut continuer sur cette lancée. J’aimerais également attirer un autre chercheur temps plein, permettre à des jeunes d’émerger et de développer des thématiques innovantes, développer davantage les outils de omics et d’intelligence artificielle, indispensables aujourd’hui pour analyser toutes les données générées. Mon rêve, c’est qu’à la fin de ma carrière, l’équipe que je dirige aujourd’hui soit encore mieux que celle où j’ai travaillé depuis mon assistanat. Incontestablement, ce contrat d’interface, c’est un cadeau incroyable que nous fait l’Inserm !
P.S. : Ce contrat m’a permis de confirmer mes aspirations. Je suis un chercheur dans l’âme donc j’aimerais me focaliser davantage sur cet aspect de ma carrière.