Pourquoi l’Inserm s’est-il doté d’une charte du temps ?
Sylvain Bourgoin : Avec la crise, notre façon de travailler a évolué. La généralisation du télétravail et la démultiplication des outils de communication qui en découlent, peuvent participer à brouiller les frontières entre vie personnelle et professionnelle. Une vigilance accrue doit donc être portée sur l’organisation de travail individuelle et collective pour éviter toute mise en risque de la santé des agents et, par voie de conséquence, du fonctionnement de la structure. La charte rappelle les points de vigilance afin de mieux s’organiser et d’endiguer d’éventuels débordements. Elle répond à un certain nombre de questionnements des personnels en matière de qualité de vie au travail. De ce fait, elle constitue un levier d’action en suite directe au document unique d’évaluation des risques professionnels, dont on mesure les effets par l’évaluation périodique des risques psychosociaux.
Comment favoriser une meilleure organisation du travail ?
S. B. : Il faut en faire un sujet en soi par un dialogue accru et régulier avec ses collègues et ses managers, et ajuster l’organisation de travail lorsque c’est nécessaire. C’est cette logique qui a présidé à l’établissement de la charte dont je tiens à souligner que c’est avant tout un outil d’échange. Les différents points et thèmes qui y sont abordés ont vocation à être discutés au sein des collectifs de travail dans les unités et dans les services. Qu’ils soient chercheurs ou ITA, dans nos laboratoires comme dans nos administrations, j’invite donc tous les personnels à s’en saisir, à l’étudier et à en débattre collectivement. Les pistes de réflexion sont nombreuses. Il convient, par exemple, de définir ensemble les canaux à utiliser (teams, mail, téléphone…) selon les situations. Pour préserver l’équilibre vie professionnelle-personnelle, j’encourage également chacune et chacun d’entre nous à limiter les sollicitations en dehors des horaires de travail. La sur-connexion, où l’on imposerait – à soi-même ou aux autres collaborateurs – une exigence de disponibilité disproportionnée est à proscrire.
Comment gérer les urgences et les pics d’activité qui peuvent survenir ?
S.B. : Tout n’est pas prévisible, mais l’anticipation reste la clé. La charte du temps apporte des conseils pour une gestion optimale des pics d’activité. Parmi eux, on peut noter de cibler les urgences lorsqu’elles relèvent de demandes récurrentes, de prévoir des interlocuteurs pour les types d’urgences listées ou encore de prévoir une récupération pour les agents. Mais cela suppose de s’accorder du temps pour prioriser et organiser ses tâches et donc d’accepter de « perdre du temps » pour en gagner plus tard.
Quel rôle jouent les encadrants dans la mise en œuvre de la charte du temps ?
S. B. : Les encadrants sont les promoteurs d’une culture managériale respectueuse des contraintes et de la vie privée de tous les agents. Ils sont donc les premiers garants d’une bonne organisation de travail. La combinaison du travail à distance et en présentiel suppose, en outre, des modes de management différents et une prise en compte des spécificités de chacun dans ces nouveaux modes de travail. Pour diminuer les risques, il appartient donc au manager d’aider ses équipes à prioriser ses tâches tout en restant à l’écoute des besoins pour savoir poser des limites, garantir le droit à la déconnexion et le respect des impératifs personnels. L’entretien annuel d’appréciation, dont la campagne est actuellement en cours, est d’ailleurs un moment d’échange privilégié entre l’agent et son responsable hiérarchique pour aborder d’éventuelles difficultés dans la gestion du temps de travail afin de trouver des solutions.