Pouvez-vous nous parler de votre parcours, de vos recherches et de vos objectifs en tant que chercheuse ?
A l’issue de mon master (CogMaster, co-habilité anciennement par l’École Normale Supérieur Ulm, l’École des Hautes Études en Science Sociale, et l’Université Paris Descartes), j’ai travaillé au sein de l’équipe sciences comportementales de la direction interministérielle de la transformation publique. Mon objectif était d’acculturer les décideurs de la fonction publique française à l’intégration des connaissances et méthodes de psychologie expérimentale dans l’élaboration et l’évaluation d’impact des politiques publiques centrées sur l’usager.
Je m’intéresse aussi depuis de nombreuses années au développement et à la promotion de l’esprit critique auprès de nombreux types de public (notamment via des activités associatives grâce à EPhiScience et au collectif Chiasma), et en particulier à l’importance d’entraîner notre métacognition (la capacité à penser sur nos propres pensées) pour améliorer nos mécanismes de raisonnement et de prise de décision.
De son côté, mon directeur de thèse, Benjamin Rohaut, neurologue en réanimation, souhaitait travailler sur la prise de décision médicale sous incertitude, et notamment l’impact des biais cognitifs sur les choix cliniques. Parmi ces phénomènes, le biais de surconfiance a souvent été cherché et identifié parmi les médecins : à la lumière de la littérature disponible sur le sujet, nos intérêts ont ainsi convergé vers ce sujet ! Aujourd’hui, je termine donc ma thèse en sciences cognitives dans l’équipe PICNIC lab de l’Institut du Cerveau, soutenue par la Haute Autorité de Santé et le Learning Planet Institute (Université Paris Cité). Mes travaux portent sur la métacognition des médecins : nous cherchons à savoir si la confiance qu’ont les médecins dans leurs connaissances et décisions est en adéquation avec celle-ci.
J’ai toujours pris du plaisir à diffuser les concepts scientifiques au plus grand nombre, me prêter à l’exercice de MT180 allait donc de soi pendant ma dernière année de thèse pour donner corps à mon travail de recherche dans une forme plus légère que celle des productions scientifiques habituelles.
Pourquoi avoir participé au concours « Ma thèse en 180 secondes » ?
À l’issue de ma thèse, je souhaite poursuivre ma carrière dans l’application des connaissances et méthodes de sciences cognitives à la société. Ce type de missions nécessite de fortes capacités à exprimer avec clarté (concision, simplicité et précision) des concepts complexes afin que tous les citoyens puissent les comprendre et que les décideurs publics puissent s’en saisir pour améliorer l’action publique. L’idée d’avoir une présentation concise de ma thèse qui soit filmée puis accessible à toutes et tous en ligne me paraissait très utile pour la suite !
Je voulais être motivée et accompagnée pour expliquer de manière courte et simple mes travaux, idéalement avec un soupçon d’humour. J’ai toujours pris du plaisir à diffuser les concepts scientifiques au plus grand nombre, me prêter à l’exercice de MT180 allait donc de soi pendant ma dernière année de thèse pour donner corps à mon travail de recherche dans une forme plus légère que celle des productions scientifiques habituelles. Par ailleurs, au-delà des médecins sur lesquels je concentre mes recherches, le message d’humilité intellectuelle (qui passe, entre autre, par la capacité d’exprimer une faible confiance quand on n’est pas sûr de ses décisions) me tient particulièrement à cœur, et c’était l’occasion d’en parler à un large public !
Lorsque vous avez décidé de participer, aviez-vous confiance en votre victoire, et comment avez-vous abordé cette compétition ?
La victoire n’était pas du tout mon objectif, et je ne suis pas adepte du concept de compétition ! En me lançant dans MT180, j’avais décidé que je suivrais le parcours de formation et que je participerais au concours de façon assidue, mais sans y mettre aucun enjeu de résultats, ni me mettre de pression, pour que l’expérience reste un plaisir et ne devienne pas une contrainte. Mis à part les pics de stress quelques heures avant de passer sur scène (qui étaient agréables, ça fait partie du jeu !), je pense que j’ai plutôt bien réussi à rester sereine et décomplexée.
Je n’avais pas confiance en une éventuelle victoire, en revanche, j’avais confiance dans l’idée que cette aventure allait être chouette à traverser et à partager avec les autres candidats et mes proches, et ça a été le cas ! L’attribution du premier prix par le jury a été une surprise, que je m’efforce de recevoir avec le plus de recul possible : j’essaie de déjouer les phrases telles que « tu l’as mérité » (la notion poussiéreuse de « mérite » n’est pas du tout appropriée à la société pleine d’inégalités dans laquelle on vit !), en soulignant le travail incroyable de mes camarades de jeu, l’accompagnement idéal dont j’ai bénéficié pour me préparer au concours, ma chance d’être parfaitement encadrée pour ma thèse, et de travailler sur un sujet qui « parle aux gens » !