Si vous deviez définir votre métier de PDG de l’Inserm en trois verbes ?
Gilles Bloch : Faire adhérer, financer et décider.
Une valeur qui vous vient à l’esprit spontanément pour l’Inserm ?
G.B. : Il y en a tellement ! Je dirais l’intégrité, car on ne peut pas faire de bonne science sans intégrité. Et je dirais aussi l’exigence.
Un souvenir professionnel marquant ?
G.B. : Si je dois n’en choisir qu’un ce serait la première soutenance de thèse à laquelle j’ai assisté quand j’étais en stage de DEA. Quand j’ai vu le travail fourni par l’étudiant, c’était tellement d’expertise, de pertinence… Cela m’a vraiment marqué ; j’ai été impressionné par le métier de chercheur. Je me suis dit : « Je n’y arriverai jamais ! » Puis on apprend le métier et on y arrive.
Qu’est ce qui a suscité votre attrait pour les sciences, rêviez-vous d’en faire votre métier ?
G.B. : J’ai été intéressé par beaucoup de choses à part la médecine… j’ai même failli faire de la philosophie. Quand j’étais petit, j’étais très intéressé par la physique, j’adorais lire Sciences et Vie. J’ai voulu être vétérinaire… puis, un peu plus grand, chirurgien. Cet intérêt pour le soin et la santé ne m’a jamais quitté, mais je suis passé de la santé animale à la santé humaine. J’ai d’ailleurs un doctorat en médecine. Et les rencontres et les opportunités ont fait que j’ai opté pour la recherche biomédicale !
Y a‑t-il un objet qui vous a suivi durant votre carrière ?
G.B. : Il y en a deux dans cette pièce. Ce cerbère posé sur la table de réunion est un cadeau amical que l’on m’a fait car cela me ressemblait quand j’étais de mauvaise humeur, mais cela ne m’arrive plus ! Le deuxième objet, qui est une pierre de vie, accompagnait un prospectus farfelu expliquant la magnétisation de l’eau. En sciences de la vie, c’est assez amusant d’avoir ça sous les yeux : face à la prolifération de fausses informations et thèses fantaisistes, c’est une mise en garde permanente pour notre mission scientifique !
Quelle est la période de l’histoire des sciences que vous préférez ?
G.B. : Je trouve fascinant le début du XXe siècle qui correspond à l’avènement de la théorie de la relativité et de la physique quantique. J’ai eu la chance de pouvoir étudier quelques années la physique et de mieux comprendre comment les sciences modernes se sont construites. Sinon, j’ai lu avec passion les ouvrages de Claude Bernard, notamment l’Introduction à l’étude de la médecine expérimentale, je trouve cela fascinant de voir comment la rationalité s’est introduite dans la médecine, cela a été un virage extraordinaire.
Dans l’histoire de l’humanité, s’il y avait une découverte que vous auriez aimé faire ?
G.B. : Il se trouve que je partage le même patronyme qu’un certain Félix Bloch, Prix Nobel de physique en 1952 pourle développement de nouvelles méthodes de mesures magnétiques nucléaires. J’ai enseigné les bases de la résonance magnétique nucléaire en DEA puis en master. Vous ne pouvez pas enseigner cette matière sans évoquer Felix Bloch. Cela m’aurait amusé de faire la découverte de mon patronyme ! Et en biologie, il y a une chose que je trouve remarquable, c’est l’effet BOLD pour Blood Oxygen Level Dependent qui en IRM fonctionnelle reflète les variations de la quantité d’oxygène en fonction de l’activité neuronale du cerveau.
Une personnalité scientifique qui vous a particulièrement inspiré ?
G.B. : Bob Shulman, biophysicien et biochimiste, pionnier de la spectrométrie de résonance magnétique nucléaire in vivo, m’a beaucoup impressionné. Il était le patron du laboratoire où j’ai effectué mon post-doctorat en 1992 – 1993 à l’université de Yale aux États-Unis.
Et pour finir sur une note humoristique, si vous pouviez transférer l’Inserm dans n’importe quelle ville du monde, laquelle choisiriez-vous ?
G.B. : J’aime beaucoup Berlin, c’est une ville culturellement stimulante, pleine d’histoire mais tournée vers l’avenir, très ouverte sur l’international et où il fait bon vivre.
À découvrir en octobre : l’interview de Khadija Bertino, gestionnaire d’unité.