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Interview de Mario Amendola : La révolution des outils CRISPR

À l’occasion d’InScience, 1er « festival » de la science et de la recherche biomédicale 100% Inserm, découvrez à travers nos interviews les portraits de chercheuses et chercheurs franciliens à travers leur parcours, leur thématique de recherche et leur vision de l’avenir de la génétique. Mario Amendola est Directeur de l’équipe « Genome Editing » au sein d’Integrare (Unité Inserm 951 / Université Paris-Saclay) au Généthon. Il nous parle ici de l’utilisation des nouveaux outils CRISPR, utilisés dans les nouvelles thérapies géniques pour lutter contre les maladies génétiques.

Paris-IDF Centre Est
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Quel est votre parcours ?

J’ai fait mes études en Italie à l’Université de Turin en biotechnologie médicale avant de partir à Milan étudier la thérapie génique. J’y ai fait mon doctorat en médecine moléculaire et développement des technologies de la thérapie génique. Je suis ensuite parti faire un post doctorat aux Pays-Bas où je me suis plus focalisé sur la constitution de l’ADN. Là j’ai commencé à travailler sur les outils de modification moléculaire tels que CRISPR j’ai été recruté par l’Institut Généthon en 2015, j’ai alors candidaté à l’Inserm dès que je suis arrivé.

Quelles sont vos thématiques de recherche ?

Dans mon équipe on fait du développement de vecteurs viraux et des outils CRISPR pour arriver à modifier l’ADN de façon précise et efficace pour traiter différentes maladies comme les maladies du sang, thalassémie, drépanocytose et des maladies métabolique.

© Inserm/Amendola, Mario/U951

A Genethon, nous produisons principalement des vecteurs AAV, l’un des principaux obstacles est la quantité de production. On utilise alors des grosses quantités de cellules cultivées dans des bioréacteurs, on y introduit l’ADN qui exprime les protéines virales d’intérêt, on purifie ensuite et pour finir on concentre les virus en solution. On peut alors les quantifier et établir la qualité.

Les vecteurs viraux en général sont des moyens de transport utilisés pour amener des gènes d’intérêts ou d’outils CRISPR. Ces derniers doivent en effet arriver dans les cellules pour modifier l’ADN.

Avec cet outil, les possibilités sont nombreuses selon
la créativité du chercheur 
Mario Amendola

Comment fonctionnent les outils CRISPR ?

Quand les outils CRISPR arrivent dans le noyau cellulaire ils vont cibler des parties certaines portions du génome et les couper pour le modifier (comme des ciseaux). Les outils CRISPR sont capables de trouver de toute petites séquences (20 nucléotides). Une fois la séquence d’intérêt ciblée, qui est souvent la séquence mutée, l’ADN est endommagé et vas ensuite pouvoir être réparé par la cellule. On force donc la cellule à faire muter l’ADN une seconde fois pour le réparer. Nous sommes capables de faire des mutations précises (gène muté sur 1 nucléotide), tout dépend de la mutation, on s’adapte pour trouver le bon outil. Par exemple on peut changer un nucléotide avec un autre bien défini.

Les possibilités avec CRISPR sont nombreuses. On peut bien sûr imaginer que cet outil peut aussi être utilisé pour les plantes etc. Certains des outils CRISPR ont été développés pour faire des tests COVID. Il y a énormément d’utilisation possible, c’est à la créativité du chercheur.

Il faut rappeler que CRISPR ne sert qu’à trouver et à couper l’ADN, la livraison des nouveaux gènes est assurée avec d’autres outils comme les vecteurs.

En ce moment aux Etats-Unis il y a déjà des essais cliniques en cours avec des résultats intéressants pour la thalassémie et la drépanocytose. Ainsi que sur le traitement de certains cancers, on peut modifier certaines cellules immunitaires pour reconnaître les protéines cancéreuses et les détruire.

© Inserm/Roingeard, Philippe
Associés à des infections respiratoires ou digestives bénignes, les adénovirus sont par ailleurs de formidables outils pour la thérapie génique.

CRISPR peut être utilisé pour réparer mais aussi pour casser des choses. Dans le cas d’une infection au VIH par exemple, le virus entre dans la cellule via une porte, avec CRISPR on peut casser cette porte et empêcher le virus de rentrer. On peut faire beaucoup plus de chose qu’avant, on s’adapte beaucoup plus vite aujourd’hui avec les outils CRIPSPR en regardant ce qui marche (réparer, casser, remplacer). On est encore au tout début mais on avance dans ce sens-là.

Quel est l’avenir de la recherche en génétique ?

La recherche avance beaucoup plus vite qu’avant. C’est très difficile à prévoir, la technologie CRISPR a été découverte en 2012 et pourtant il a fallu attendre cette année pour des essais cliniques concluants et un prix Nobel.

Il est bon de rappeler que CRISPR est initialement un outil du système immunitaire des bactéries. Maintenant que l’on sait quoi chercher chez les milliards de bactéries que nous connaissons nous pouvons imaginer trouver d’autres outils, dans quelques années peut-être que les outils CRISPR auront été remplacés par une autre découverte.

Enfin n’oublions pas qu’il y a bien évidemment toujours un décalage entre les découvertes scientifiques et les essais cliniques, le traitement des patients. Quelles que soient les avancées actuelles dans le domaine de la modification d’ADN/ARN, il faudra attendre encore pour voir apparaître de nouveaux traitements.