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Elles sont l’Inserm – Françoise Rédini : entre rencontres, passion et entraide

Découvrez notre série d'interviews "Elles sont l'Inserm" consacrée aux portraits de femmes travaillant pour l'Inserm et partageant leur point de vue sur les questions d'égalité et de parité. Françoise Rédini, directrice de recherche au sein de l'unité 1238 et responsable qualité, s'est prêtée au jeu.

Grand Ouest
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Issue d’un baccalauréat série biologie, Françoise Rédini a aujourd’hui la double casquette de directrice de l’unité Inserm UMR1238 – Sarcomes osseux et remodelage des tissus calcifiés – et de responsable de la mission qualité au sein de l’Inserm.

Françoise Redini, directrice de laboratoire unité de recherche Inserm U957, « physiopathologie de la résorption osseuse et thérapie des tumeurs osseuses primitives », Nantes. Le 6 février 2017, Maison de la Chimie, Paris.

Quelles études avez-vous suivies pour faire de la recherche ?

Je n’y ai jamais trop réfléchi et la question ne s’est pas vraiment posée en réalité. C’est un peu comme Obélix et la potion magique, je suis tombée dans la science quand j’étais petite. J’ai toujours eu un attrait pour la biologie. Plus jeune, je me posais souvent des questions « Pourquoi ? » ou « Comment ? », « Pourquoi la plante pousse ? Comment est-ce que ça fonctionne à l’intérieur ? ». Plus qu’un attrait, je dirai même que j’ai toujours été passionnée par les sciences.

Quelles études avez-vous suivies pour faire de la recherche ?

En ce qui concerne la recherche, ça s’est fait tout naturellement. Pour faire suite à mes années collège/lycée, j’ai tout de suite intégré la biologie à l’université, c’était évident : DEUG, Licence, Maitrise, DEA puis finalement Thèse en 1987. J’ai ensuite entrepris un post-doc. Dans la suite logique, j’ai fait une première tentative au concours Inserm. C’est lors de mon deuxième essai que j’ai intégré l’Institut en 1989.

A 27 ans à peine, Françoise Rédini rejoint les rangs de l’Inserm. L’aventure de chercheuse commence !

Comment en êtes-vous arrivée aux postes que vous occupez aujourd’hui ?

Lorsque j’ai débuté en tant que chercheuse dans une autre ville du Grand Ouest, j’ai longtemps travaillé (12 ans) dans la recherche plus fondamentale. Je m’intéressais particulièrement à la régulation de l’expression de gènes. J’y ai vécu un période difficile à cause du comportement de la direction à mon égard lors de ma troisième grossesse. J’ai voulu me réorienter vers l’enseignement.

En 2000, j’ai eu l’occasion d’emménager à Nantes. Passionnée par la biologie, j’ai persévéré, en changeant de spécialité. J’avais envie de me rendre utile. C’est comme si, jusqu’alors, j’étais une chenille coincée dans une chrysalide qui s’est finalement ouverte pour laisser place à un papillon. J’ai pris mon envol dans la recherche clinique, en cancérologie. Retours aux sources donc, puisque j’ai effectué ma Thèse autour de ce sujet.

Après plusieurs années en tant que chercheuse dans le laboratoire, j’ai été promue Directrice de recherche au bout de la 5ème tentative en 2007. Pour le poste de responsable de la mission qualité que j’occupe depuis mars 2019, c’est entre autre le hasard des rencontres qui m’a offert cette opportunité. J’ai fait la connaissance d’une ingénieure de recherche passionnée dans mon laboratoire, qui m’a initié à la démarche qualité. C’est tout un état d’esprit ! J’ai eu la chance de rencontrer l’ancienne responsable qualité. On a eu un très bon contact sur plusieurs années, puis elle m’a proposé de reprendre le poste à sa suite.

On sent la passion en vous, quand vous parlez de votre métier, qu’est-ce qui vous motive le plus ?

Travailler sur le cancer de l’enfant, ce n’est pas tous les jours facile. Mais je me sens utile. J’ai la chance de rencontrer beaucoup de personnes bienveillantes, à l’écoute. Je pense que c’est nécessaire après autant d’années de recherche. J’ai la possibilité d’être au contact des parents, avec différentes associations, lors de rencontres avec les chercheurs. Partager mon savoir lors d’échanges très humains, très simples, autour d’une thématique commune qui nous touche, c’est ce que j’apprécie le plus. Même si je ne suis qu’un maillon de la chaîne, je suis heureuse de contribuer à rendre l’avenir de ces enfants un peu plus radieux.

La condition féminine au sein de l’Inserm.

Avez-vous rencontré des problèmes pour évoluer parce que vous êtes une femme ?

En tant que chercheur(e)s, on a parfois du mal à s’exprimer. Mais je trouve que nous, les femmes, nous avons davantage de difficultés à nous exprimer à l’oral. Et dans le monde de la recherche, ça tend à nous porter préjudice. On le voit par exemple avec la gestion de la crise sanitaire actuelle, s’il y a quelques femmes médecins qui interviennent à la TV, la majorité des invités sur les plateaux sont de hommes. Personnellement, j’ai du mal à me vendre. Cela a été une véritable difficulté pour évoluer : les commissions sur dossiers sont rares lorsque l’on vise des postes à plus hautes responsabilités ; il faut donc se défendre oralement. Selon moi, beaucoup de jeunes chercheuses sont freinées dans leur carrière à cause de cela.

Au cours de votre carrière, avez-vous déjà fait face à des situations difficiles, liées à votre condition féminine ?

Je peux facilement mentionner des expériences parlantes que j’ai vécues lors de mon poste précédent. Le directeur du laboratoire était très particulier dans ses échanges avec les membres de l’équipe, d’autant plus avec les femmes. Lorsque j’ai annoncé ma troisième grossesse, j’ai tout de suite été mise de côté. Je n’étais plus considérée et on m’a retiré la tutelle de l’étudiant que je dirigeais. C’était un vrai coup dur. D’ailleurs, comme j’ai eu des difficultés, j’ai pris un congé parental de 6 mois supplémentaires. Ça m’a un peu porté préjudice, puisque par la suite, on me le faisait remarquer « Tu as pris 6 mois d’arrêt, c’est beaucoup quand même, des choses se sont passées depuis dans la recherche… ».

Plus récemment, au sein de mon laboratoire. L’un de mes collègues masculins avait un comportement assez déplacé vis-à-vis des autres ; d’autant plus avec les jeunes femmes de l’équipe. C’était insupportable. Si j’ai très vite pris la main pour faire cesser ses agissements, je me suis confrontée à bien des difficultés. Cette personne ne voulait pas reconnaitre mon autorité de directrice, encore moins parce que j’étais une femme. Il remettait sans cesse en question ma capacité à diriger l’équipe et me discréditait : « J’ai davantage de publications que ma directrice, j’ai rapporté bien plus d’argent qu’elle, je suis le meilleur chercheur du laboratoire ». Un ensemble de remarques qui est difficile à entendre. Je n’ai jamais connu ce type de comportement chez une collègue femme.

Finalement, je pense que les femmes, nous devons nous battre davantage pour nous faire reconnaitre. J’espère qu’avec la nouvelle génération de chercheurs, on verra des changements et que ce genre de comportement disparaitra.

Qu’en est-il de la parité femmes/hommes au sein de votre laboratoire ?

Au niveau des chercheur(e)s, nous sommes deux femmes, une chercheure CNRS et moi-même. Les autres chercheurs sont tous des collègues masculins. Sur les postes administratifs, le laboratoire embauche autant de femmes que d’hommes. Le laboratoire comprend autant de maitres de conférences hommes que femmes.

La parité n’est certes pas parfaite, mais j’estime que ce n’est pas le plus important. Je n’ai jamais privilégié soit plus de femmes soit plus d’hommes, ce serait tomber dans l’extrême que de vouloir absolument la parité pour respecter un quota. Lorsqu’une personne postule pour intégrer le laboratoire, les questions que je me pose en premier sont : “Qu’est-ce qu’elle peut apporter à l’équipe ? Qu’est-ce qu’on peut lui apporter ?” Finalement, ce qui m’intéresse avant tout c’est sa valeur en tant que personne, et le bien vivre ensemble.

Pensez-vous que l’Inserm pourrait proposer davantage de solutions pour les femmes ?

Il faut savoir que l’Inserm est très à l’écoute des employé(e)s, notamment lorsque des problèmes surviennent. Que ce soit femme ou homme, des aides pour prévenir les risques psychosociaux sont déjà en place. Avec du recul, j’aurais dû moi-même le faire lorsque la situation était délicate à Caen. Je ne peux que conseiller aux employé(e)s d’oser en parler lorsqu’ils font face à un problème.

Pour ce qui est d’aider les femmes plus particulièrement, je pense qu’il serait intéressant de proposer des ateliers, des formations à l’expression orale. Comme je l’ai mentionné précédemment, c’est un point qui selon moi représente un trop gros frein.

En tant que chargée de la mission qualité, je vais dans tous les cas m’attacher à proposer d’autres solutions et je chercherai encore et toujours à améliorer le fonctionnement de l’Inserm. Et puis il faut voir aussi l’évolution des mentalités. Depuis au moins 5 – 6 ans, on voit une amélioration, l’Inserm est encore plus bienveillant envers les femmes et les problèmes qu’elles rencontrent.

Un mot de la fin pour les jeunes filles qui veulent intégrer la recherche ?

Jeunes filles, futures chercheures, O‑S-E‑Z ! Osez vous mettre en avant. Osez parler lorsqu’il y a des choses à dire. Et osez vivre votre passion pour les sciences.

En somme, Françoise Rédini est une chercheuse dévouée à son métier, toujours prête à partager ses connaissances et à œuvrer pour les changements. Nommée en tant que responsable qualité ou encore appelée pour être référente pédiatrique à l’INCa, elle se dit épanouie dans son quotidien professionnel.

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