Même une consommation unique de substances comme le cannabis ou les cannabinoïdes de synthèse peut laisser des traces durables dans le cerveau. Ces effets sont particulièrement marqués chez les adolescents, dont le cerveau est en pleine croissance.
Les travaux menés par Olivier Manzoni, directeur de recherche à l’Inserm, Pascale Chavis, directrice de recherche au CNRS, et leur équipe à l’Institut de neurobiologie de la Méditerranée (Inmed – AMU/inserm) se sont concentrés sur le cortex préfrontal. Cette région cérébrale, associée à la prise de décision, au contrôle des impulsions et aux interactions sociales, est particulièrement vulnérable pendant l’adolescence. Leur recherche met en évidence que l’exposition aux cannabinoïdes de synthèse peut perturber le développement normal du cortex préfrontal, entraînant à long terme des difficultés cognitives et comportementales.
Une découverte clé de leur étude concerne la Reelin, une protéine essentielle au développement et au fonctionnement du cerveau. La consommation de cannabinoïdes de synthèse entraîne une diminution significative des niveaux de Reelin, ce qui altère la communication entre les neurones, déséquilibre les signaux cérébraux et réduit la plasticité cérébrale. Ces perturbations sont à l’origine des problèmes comportementaux observés chez les consommateurs de ces substances.
En utilisant un modèle de souris mâles adolescentes, les chercheurs ont démontré qu’une seule dose de cannabinoïdes de synthèse suffit à réduire fortement les niveaux de Reelin dans certaines régions du cortex préfrontal. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, cette diminution n’est pas due à une production moindre de la protéine, mais à une dégradation accélérée.
Un autre aspect crucial de leur découverte est le rôle des récepteurs cannabinoïdes CB1R. Ces récepteurs, souvent présents dans les mêmes cellules que la Reelin, jouent un rôle central dans le mécanisme de réduction de cette protéine. Les chercheurs ont établi que l’activation des CB1R par les cannabinoïdes de synthèse déclenche la dégradation de la Reelin, amplifiant ainsi les effets néfastes sur le cerveau adolescent.
Ces travaux soulignent l’importance de mieux comprendre les risques liés à l’exposition aux cannabinoïdes, en particulier chez les jeunes, afin d’informer les politiques de prévention et d’encadrer l’usage de ces substances.