ONCOLille permettra des interactions quotidiennes entre chercheurs, enseignants-chercheurs, hospitalo-universitaires et cliniciens. L’institut rassemblera dans un même bâtiment des équipes de recherche existantes afin d’en rationaliser le fonctionnement et favoriser les collaborations scientifiques. « Tous les laboratoires de cancérologie rejoignent l’institut ONCOLille. Les laboratoires qui possèdent des équipes « cancer » l’intégrent également et seront parties prenantes ou laboratoires associés, comme par exemple, l’UGSF et PRISM. Nous serons environ 300 personnes. », précise Isabelle Van Seuningen.
C’est Pierre Formstecher, ancien directeur du Centre de Recherche Jean-Pierre Aubert (Unité Inserm 1172), qui eut l’idée de créer un institut de recherche sur le cancer interdisciplinaire. Pour que ce projet voit le jour, l’ensemble des tutelles (Université de Lille, Inserm, CNRS, le CHU de Lille et le Centre Oscar Lambret) ont été mises à contribution. Et l’Etat, la région Hauts-de-France et la Métropole Européenne de Lille (MEL) ont permis son financement. Les deux Contrats de Plan État-Région (CPER) ont aidé à sa mise en place. L’intitulé du dernier CPER cancer 2015 – 2020 était l’institut ONCOLille.
Isabelle Van Seuningen a plusieurs casquettes : directrice de l’institut ONCOLille, elle est également directrice du laboratoire CANTHER « Hétérogénéité, Plasticité et Résistance aux Thérapies des Cancers ». Créé en janvier 2020, ce laboratoire est une unité mixte de recherche (Inserm, CNRS, Université de Lille, CHU de Lille, Centre Oscar Lambret, Institut Pasteur de Lille et Institut de Recherche contre le Cancer à Lille), qui a pour objectif de mieux comprendre les mécanismes de résistance aux traitements des cancers. Il comporte cinq équipes, soit 200 membres environ. Sa directrice répond à nos questions :
1. Si vous deviez expliquer, en une phrase, en quoi consiste Canther, que diriez-vous ?
« Le laboratoire Canther rassemble des chercheurs et des cliniciens qui travaillent sur la compréhension des mécanismes de résistances aux thérapies des cancers. Canther est une unité emblématique puisqu’il rassemble près de 80% de la cancérologie en biologie sur Lille. »
2. Quelle est la place de la technologie médicale dans le laboratoire Canther ?
« La place de la technologie est de plus en plus importante dans la recherche en général et dans la recherche en cancérologie en particulier. Nous travaillons sur des mécanismes très complexes et nous nous devons d’être à la pointe de la précision afin de pouvoir étudier tous les compartiments du cancer, son hétérogénéité et sa plasticité.
Au laboratoire, nous pouvons étudier la cellule unique, mettre en place de nouveaux modèles en trois dimensions in vitro avec les organoïdes, – ou plutôt tumoroïdes -, qui sont développés à partir d’échantillons tumoraux de patients. Nous créons in vitro la tumeur dans son ensemble.
Nous avons des modèles synthétiques de bio impression en trois dimensions qui nous permettent également de recréer une tumeur et son environnement.
Il y a également les « omics », qui sont des technologies à grande échelle avec lesquelles nous sommes en mesure de regarder l’ensemble des gènes relatifs à un mécanisme, c’est-à-dire observer une situation bien précise d’une cellule : le transcriptome (l’ensemble des ARN exprimés par la cellule), le métabolome (l’ensemble des gènes qui régulent le métabolisme de la cellule), le génome (l’ensemble des gènes exprimés par la cellule) et l’épigénome (l’ensemble des gènes qui régulent les mécanismes épigénétiques de la cellule) et le protéome ( l’ensemble des protéines exprimées par la cellule).
Ces technologies sont utiles pour caractériser le plus finement possible tous les mécanismes et modifications qui se déroulent au niveau de la cellule cancéreuse et de son environnement. Elles nous permettent d’aller encore plus loin dans leur compréhension. »
3. Quels sont les projets de Canther ?
« Ce sont des projets qui mêlent multidisciplinarité et interdisciplinarité. Un des projet phare de CANTHER a été le développement des « organoïdes tumoraux », qui recréent une mini-tumeur in vitro en 3D.
Il y a également les modèles murins chimio-résistants à partir de tumeurs de patients « PDX » ou Patient Derived Xenograft : les chercheurs xénogreffent (greffes entre espèces différentes) des morceaux de tumeurs de patients chez la souris et les rendent chimio-résistants en leur administrant le traitement.
Je peux également citer les modèles micro-fluidiques en collaboration avec le programme de recherche international LIMMS (ou SMMiL‑E « Seeding Microsystems in Medecine in Lille – European-Japanese Technologies against Cancer »). L’objectif est de pouvoir recréer in vitro en 4D une tumeur dans son environnement, dans un dispositif micro-fluidique contrôlé. C’est-à-dire qu’en plus de la tumeur et son environnement (en 3D), nous contrôlons entre autres le pH, le niveau d’oxygène, la pression et la rigidité tumorales.
Et dernièrement, il y a eu l’arrivée d’un nouveau chercheur Inserm, Suman Mitra. La venue de ce dernier a permis au laboratoire de se doter d’une nouvelle expertise en onco-immunologie « CAR‑T cells » et immunothérapie. »