Orléans, point d’ancrage pour accélérer les innovations à ARN messager

L’accélérateur de recherche technologique (ART) ARNm de l’Inserm est implanté au CHU d’Orléans. Il est dédié au développement de technologies à base d’ARN messager avec des applications en vaccination, immunomodulation et traitement de maladies génétiques. Cet ART constitue une plateforme complète de production et de formulation, résolument tournée vers la recherche translationnelle.

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Les accélérateurs de recherche technologique (ART), initiés par l’Inserm dès 2015, ont pour ambition de combler le fossé entre recherche fondamentale et applications pratiques. En collaboration le plus souvent avec l’industrie, les ART se concentrent autour du développement accéléré de technologies destinées aux chercheurs et cliniciens. Le but : favoriser la connexion entre recherche fondamentale et applications cliniques.

Parmi les ART créés ces dernières années, l’ART ARNm, opérationnel depuis 2023, se distingue par son rôle dans l’exploration des thérapies à base d’ARN messager.

Coproduction et valorisation

Véritable hub technologique, l’ART ARNm de l’Inserm accompagne les équipes académiques et industrielles souhaitant intégrer les technologies à ARNm dans leurs projets. Contrairement à une unité de service classique, qui fonctionne sur un modèle de prestation, la majorité des collaborations menées au sein de l’accélérateur relèvent d’une collaboration scientifique fondée sur le partage d’expertises et d’innovations. « C’est avant tout une opportunité d’appliquer nos savoir-faire et d’en acquérir de nouveaux. Les partenariats avec l’industrie permettent aussi de valoriser nos avancées. », explique Chantal Pichon, directrice de l’accélérateur.

Ce positionnement se traduit notamment par des collaborations avec le CRCM de Marseille pour la formulation des ARNm, ou encore avec l’Institut Pasteur et l’Institut Curie sur différentes applications immunologiques.

En lien étroit avec Inserm Transfert pour la gestion de la propriété intellectuelle, l’ART ARNm poursuit actuellement sa montée en puissance technologique, notamment grâce à un partenariat avec Sartorius BIA Separations, spécialiste de la purification à grande échelle des acides nucléiques. L’entreprise apporte son expertise pour optimiser l’étape finale de purification des ARN produits à partir de levures — une alternative prometteuse aux procédés classiques.

Souveraineté technologique et réduction des coûts

Aujourd’hui, la production in vitro d’ARN repose sur des enzymes et des réactifs majoritairement brevetés par des laboratoires académiques et entreprises américaines. Leur coût élevé et la dépendance technologique qui en découle sont de vrais verrous qui limitent l’accès des innovations thérapeutiques à base d’ARNm dans les pays à ressources limitées.

Dans le projet européen Yscript (EIC Pathfinder Open 2021), l’équipe de Chantal Pichon a mis au point une technologie de bioproduction d’ARN messager fondée sur l’utilisation de levures pour surmonter ces obstacles. 

En tant que cellules eucaryotes, les levures disposent d’une machinerie cellulaire proche de celle des cellules humaines, ce qui permet d’obtenir des ARN messagers naturellement compatibles avec un usage thérapeutique. Leur usage est bien maîtrisé par les scientifiques, qui les exploitent depuis des décennies. Enfin, les procédés de fermentation étant standardisés, cela facilite la production à grande échelle tout en réduisant la dépendance aux réactifs importés.

En collaboration avec l’industriel Sartorius, l’ART s’attache désormais à optimiser l’étape finale de purification des ARN produits en levure, afin de répondre aux exigences de qualité du secteur pharmaceutique.

Synergie recherche-soin

En parallèle, l’ART ARNm maintient une activité de recherche translationnelle étroitement liée aux besoins cliniques. Son équipe, composée à parts égales de chercheurs et de cliniciens-chercheurs, se concentre notamment sur la conception de vaccins anticancer basés sur les caractéristiques moléculaires propres à chaque tumeur, ainsi que sur la réactivation ciblée de cellules immunitaires dites « épuisées ».

Chez certains patients atteints de cancer, les cellules immunitaires, bien que présentes, perdent progressivement leur capacité à reconnaître et à éliminer les cellules tumorales. Pour contrer cet « épuisement », l’équipe développe des approches utilisant l’ARN messager pour stimuler ex vivo ces lymphocytes, en restaurant leur activité avant de les réinjecter au patient. Chantal Pichon souligne : « Le rattachement à l’Inserm apporte une réelle plus-value au développement des formulations à visée thérapeutique. » 

Cette stimulation maîtrisée des lymphocytes permet de restaurer leur capacité à combattre efficacement la tumeur, tout en limitant les effets secondaires liés à une activation prolongée ou excessive du système immunitaire.

Prochain défi : le développement de nouvelles technologies de ciblage in vivo, pour acheminer de façon sélective l’ARNm vers les cellules d’intérêt et optimiser à la fois l’efficacité thérapeutique et la sécurité des traitements.

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