Toutes les cellules vivantes, depuis les organismes les plus simples jusqu’aux structures les plus élaborées telles que les neurones, renferment une concentration significative de potassium. Ce précieux ion se déplace à travers les membranes cellulaires grâce à des protéines spécialisées appelées canaux potassiques. Ces canaux sont à l’origine des signaux électriques permettant aux cellules de communiquer entre elles.
Au cours d’une évolution qui s’étend sur des centaines de millions d’années, une solution unique s’est imposée pour le transport sélectif du potassium à travers les membranes cellulaires : les canaux potassiques. Ces protéines, qui créent un pore à la surface des cellules, imitent la structure d’hydratation de l’ion potassium, facilitant ainsi son passage à travers des membranes normalement imperméables, tout comme dans l’eau.
En exploitant cette structure moléculaire, une nouvelle classe de canaux potassiques a été découverte en 1995, dont certains membres sont impliqués dans les effets des anesthésiques volatils généralement utilisés en clinique humaine. Une découverte majeure en 2012 a révélé que certains canaux de cette famille peuvent également transporter du sodium dans certaines conditions, notamment en cas d’acidification. Ce transport du sodium revêt une importance capitale pour les cellules excitables et est normalement assuré par d’autres types de canaux ioniques aux structures totalement différentes.
Grâce à la puissance du calcul informatique et à la modélisation des mouvements conformationnels au sein du canal, appelée « dynamique moléculaire », Franck Chatelain, Chargé de recherche au CNRS et Florian Lesage, Directeur de recherche à l’Inserm, affiliés à l’Institut de pharmacologie moléculaire et cellulaire (IPMC – UniCa/CNRS/Inserm) ont démontré que le transport du sodium est le résultat d’un réarrangement du pore. Lorsque l’acidification cesse, le pore retrouve son état conformationnel sélectif au potassium. Cette évolution, qui a trouvé une solution unique pour le transport du potassium, a permis de raffiner la structure du pore au fil du temps et d’y ajouter une fonction supplémentaire : le transport du sodium en cas d’acidification. Ainsi, ce canal agit comme un régulateur de l’excitabilité cellulaire, inhibant cette dernière dans un état et la favorisant dans un autre. Il est fascinant de constater l’œuvre continue de l’évolution dans ce domaine.
Les recherches en cours visent à approfondir la compréhension du rôle physiologique de cette sélectivité ionique dynamique, ainsi que l’implication des canaux de cette famille dans la douleur et les maladies neurodéveloppementales, souvent liées à des mutations génétiques affectant ces canaux.
Voir la publication. https://www.nature.com/articles/s41467-024 – 48067‑w
Contact chercheur
Dr Florian Lesage, DRCE Inserm
Laboratoire d’Excellence – Ion Channel Science and Therapeutics, director
Institut de Pharmacologie Moléculaire et Cellulaire, director
Université Côte d’Azur, CNRS UMR 7275, Inserm U1323
660, route des lucioles
F‑06560 Valbonne
Tel 33 (0)4 93 95 77 10
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