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Organisation cellulaire et contacts entre organites

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Fabien Alpy, directeur de recherche Inserm dans l’équipe de Biologie moléculaire et cellulaire du cancer du sein à l’Institut de Génétique et de Biologie Moléculaire et Cellulaire (unité Inserm/CNRS/université de Strasbourg), étudie l’organisation cellulaire et les contacts entre organites. L’équipe a identifié une protéine, nommée MOSPD2, à l’origine de contacts entre le réticulum endoplasmique (RE)* et les gouttelettes lipidiques** et impliquée dans la biogenèse de ces gouttelettes. Ces résultats sont publiés dans Journal of Cell Biology.

Dans quel contexte faites-vous ces recherches ? 

C’est un article de recherche fondamentale en biologie cellulaire. Au laboratoire, nous nous intéressons à l’architecture des cellules et en particulier aux relations entre les organites (subdivisions au sein même d’une cellule). Les organites sont des unités fonctionnelles spécialisées. Par exemple, les mitochondries qui produisent l’énergie pour toutes les réactions cellulaires, le noyau contenant le matériel génétique etc.

Les organites sont des éléments mobiles et actifs dans les cellules, ils interagissent les uns avec les autres au niveau de structures nommées sites de contacts membranaires, qui sont des régions où les membranes de deux organites sont très proches l’une de l’autre, mais ne fusionnent pas. Les contacts membranaires sont régulés par des protéines qui commandent leur architecture et les échanges de matériels entre les organites. C’est dans ce contexte global de recherche que s’inscrit notre dernier article.

Dans ce travail, nous nous sommes intéressés à une protéine du RE. Une caractéristique centrale de cet organite est qu’il entre en contact physique avec la plupart des autres organites de la cellule. Et pour ce faire, il utilise des récepteurs, qui sont à la surface du RE, qui appartiennent à la famille des protéines VAP (Protéine associée à une vésicule). Il existe 6 membres de cette famille, dont 3 bien caractérisés : VAP‑A, VAP‑B et MOSPD2.

Lors de l’identification de MOSPD2 en 2018, nous avons montré que c’est un récepteur du RE capable d’interagir avec des protéines localisées à la surface d’autres organites. Ce mécanisme permet de créer le contact entre le RE et d’autres organites, tels que les mitochondries, les endosomes etc.
MOSPD2 est différente des autres protéines VAP. Premièrement, elle contient un domaine protéique en plus. Deuxièmement, en étudiant sa localisation précise dans les cellules, nous avons observé que la protéine s’accumulait dans des régions du cytoplasme où les autres protéines VAPs ne vont pas.
Nous nous sommes alors demandé à quoi correspondaient ces régions et nous avons montré que ce sont des zones de contacts entre le RE et des organites appelés gouttelettes lipidiques. Les gouttelettes lipidiques sont des microgouttes d’huile couvertes d’une couche de lipides polaires, présentes à l’intérieur de nos cellules. MOSPD2 attache le RE à ces gouttelettes car une partie de la protéine a la propriété d’interagir directement avec la partie huileuse des gouttelettes.
Une autre question s’est alors posée : en quoi MOSPD2 est-elle importante pour les gouttelettes ?
Pour répondre à cette question, nous avons alors généré des cellules dépourvues de protéine MOSPD2 et avons constaté que dans ces cellules les gouttelettes devenaient plus rares et petites, ce qui nous a montré que MOSPD2 a un rôle dans la biogenèse des gouttelettes lipidiques à une étape que nous n’avons pas encore identifiée.

Quel est l’importance des gouttelettes lipidiques ?

Elles sont associées à différents mécanismes biologiques essentiels, ce sont des structures de stockage d’énergie. Dans le tissu adipeux, ce sont les gouttelettes lipidiques qui stockent le gras et permettent d’avoir une réserve d’énergie. Des travaux récents montrent qu’elles ne sont pas de simples réservoirs d’huile mais qu’elles ont un rôle plus général dans des mécanismes biologiques comme l’immunité. Il y a toute une série de nouvelles fonctions des gouttelettes lipidiques qui commencent à être décrites dans la littérature.

Quelles vont être les prochaines étapes ?
 
Premièrement de disséquer le mode d’action de MOSPD2 à l’interface entre le RE et les gouttelettes. Notre hypothèse ? Nous pensons que c’est une protéine avec un domaine qui lie des lipides, et les transportent entre les deux organites.
Deuxièmement, nous essaierons de comprendre l’importance physiologique de ces protéines, savoir si des maladies sont associées à des mutations de MOSPD2. Dans l’équipe, nous travaillons sur le cancer du sein : MOSPD2 est surexprimé dans certains de ces cancers, nous aimerions comprendre sa fonction dans cette pathologie.

Consulter la publication
Interview réalisé par Ammra Tan

*Réticulum endoplasmique (RE) : organite formant des tubes et des feuillets qui s’étendent dans tout le cytoplasme cellulaire.

**Gouttelettes lipidiques : Ce sont des structures sphériques à l’intérieur du cytoplasme qui sont des gouttes d’huiles. Elles se forment à la surface du RE, avec des lipides neutres qui forment des lentilles d’huile à la surface du réticulum. Ces lentilles croissent, bourgeonnent, et forment une structure sphérique se décollant du RE.