Polémique sur l’accès restreint aux traitements innovants
Le Monde rend compte de la polémique qui couve après des refus successifs, ces derniers mois, de prise en charge de médicaments innovants par la Haute Autorité de santé (HAS). En toile de fond, le débat sur la méthodologie d’évaluation des médicaments qui permet, ou pas, leur remboursement par la Sécurité sociale. Car la plupart des refus ou des mauvaises notes attribuées sont justifiés par l’absence de phase 3 ou d’essais cliniques comparatifs randomisés, l’étalon-or des décisions de la HAS. Or, les progrès de la médecine de précision, en ciblant des mutations génétiques ou des anomalies moléculaires rares, rendent la production de ces données scientifiques plus complexe, les populations auxquelles ces médicaments sont destinés étant plus restreintes. Le Pr Fabrice Barlesi, directeur général de l’Institut Gustave-Roussy souligne : « Comment expliquer à un malade qu’il n’aura pas accès à un traitement pourtant disponible chez nos voisins ? Il est certain qu’avoir une phase 3, quand c’est possible, constitue une méthodologie indiscutable. Mais entre le moment où l’on a des premiers résultats très prometteurs, comme c’est, par exemple, le cas avec les inhibiteurs de RET [traitements contre des cancers], et des résultats d’étude de phase 3, il serait légitime d’adopter un a priori positif, et d’en faire bénéficier rapidement les patients, plutôt qu’un a priori négatif. » La communauté scientifique se querelle sur la question.
Le Monde, 06/06
Congrès mondial du cancer à Chicago
Vaccin, anticorps conjugués… Lors du week-end des 3 et 4 juin, plusieurs présentations ont enthousiasmé les participants au congrès mondial du cancer à Chicago (Asco), rapporte La Croix. Les anticorps conjugués, qui avaient déjà fait sensation l’an dernier, continuent d’être décrits comme « révolutionnaires » par les spécialistes en oncologie. Après la chimiothérapie et l’utilisation des thérapies ciblées, « cette méthode permet d’associer les deux, elle est l’avenir de la lutte contre le cancer », assure Maya Gutierrez, oncologue médicale à l’Institut Curie. « De plus en plus de traitements d’anticorps conjugués vont voir le jour très rapidement, se réjouit l’oncologue. Certaines études sont par exemple en cours sur le cancer du poumon et celui des ovaires. » Ces traitements agissent comme « un missile » qui détruit les cellules tumorales « sans effets collatéraux », explique la spécialiste. Si cette méthode engendre toujours des effets indésirables, ces derniers restent moins importants qu’avec une chimiothérapie. Pour l’heure, elle est surtout utilisée pour soigner un sous-type de cancer du sein, « mais on peut imaginer qu’elle pourra être adaptée à chaque type de cancer », estime Maya Gutierrez. Autre avancée majeure : un vaccin en phase 1 d’expérimentation, développé par Transgene, pourrait réduire les récidives des cancers ORL. Au total, près de 5 800 études ont été présentées au congrès, qui a réuni 40 000 personnes jusqu’à ce mardi 6 juin. Si beaucoup de présentations sont porteuses d’espoir, l’oncologue médical Jérôme Barrière reste prudent face aux effets d’annonce et rappelle qu’un congrès n’est « pas une instance d’enregistrement des médicaments qui donne le feu vert immédiat à de nouveaux traitements ».
La Croix, Le Monde, Le Figaro, 06/06
En bref
Près de 1 300 enfants entrent prématurément dans la puberté chaque année, en grande majorité des filles. Olivier Puel, président de l’Association française des pédiatres endocrinologues libéraux (Afpel), souligne que « pour prouver qu’il y a bien une relation [entre perturbateurs endocriniens et puberté précoce], il faudrait que nous soyons capables de croiser les cas de puberté précoce avec une cartographie des perturbateurs endocriniens, or c’est très compliqué à faire car ils sont partout ». La Croix, 06/06
Présent à Lyon depuis plus de cinquante ans, le Centre International de recherche sur le cancer (Circ) œuvre pour la lutte contre la maladie à travers le monde surtout dans les pays les plus défavorisés. Grâce à une coopération internationale, l’établissement fait aussi office de référence en matière de recherche, de prévention, mais aussi de transmission comme l’explique à La Tribune Elisabete Weiderpass, directrice du Circ. Le Circ, installé à Lyon depuis 1965, vient de déménager pour s’installer dans le biodistrict de Gerland. Ce nouveau bâtiment de 11.000 m² de locaux a nécessité un investissement de 65 millions par la Région, l’Etat, la Métropole et la Ville. A ce jour, le Circ compte environ 300 salariés et espère aller jusqu’à 500 d’ici cinq ou six ans. « Notre difficulté c’est qu’on n’a pas les moyens financiers de recruter plus, mais nous avons maintenant la capacité physique d’accueillir d’autres chercheurs. On va créer des synergies avec d’autres acteurs français et ailleurs (Inserm, Institut national du cancer) pour inviter plus des chercheurs à faire leurs recherches chez nous. […] Heureusement, la France est riche avec des ressources humaines qualifiées dans le domaine de la recherche. Les chercheurs sont là, il faut qu’on trouve les moyens pour les postes. » La Tribune, 06/06
Stress, surcharge de travail, horaires décalés, charge mentale… Sur les plans physique et psychologique, la santé des soignants est mise à rude épreuve. Et la crise du Covid n’a fait qu’accentuer le phénomène. En 2022, le volet 3 de l’enquête EpiCov, élaborée par l’Inserm et la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) et fondée sur les réponses de 2 900 salariés du secteur hospitalier, a montré que 68 % des personnes mobilisées au sein de services Covid avaient connu des périodes inhabituelles de surcharge de travail. Parmi eux, une personne sur deux a pu craindre que sa santé soit mise en danger en raison de ses conditions de travail. Les médecins interrogés étaient par ailleurs seulement 60 % à se sentir capables de pratiquer leur travail actuel jusqu’à la retraite. Le Généraliste, 05/06
Le projet Zoonomia est une impressionnante étude comparative des génomes animaux. Le 27 avril, un consortium international, Zoonomia, révélait, dans onze articles publiés par la revue Science, ses résultats de la comparaison des génomes de 240 mammifères. Lancé en 2015, le projet Zoonomia regroupe plus de 150 scientifiques et 30 équipes à travers le monde. C’est l’une des dizaines de grandes initiatives visant à séquencer des génomes animaux. En révélant les régions du génome conservées au fil de l’évolution (partagées entre de nombreuses espèces), ou celles qui sont propres à une poignée d’espèces, ces comparaisons livrent « un traducteur évolutif extraordinaire », se réjouit Stanislas Lyonnet, directeur de l’institut Imagine à l’hôpital Necker (AP-HP, Inserm, université Paris Cité). Elles éclairent aussi la masse sombre des génomes, cet univers méconnu : l’ADN « non codant », qui représente 98 % du génome humain, par exemple. Lemonde.fr, 05/06