Recherche : se méfier des revues prédatrices
La Conférence des doyens de médecine (CDD) et le Conseil national des universités pour les disciplines de santé (CNU Santé) ont publié, lundi 19 juin, une liste de 3 400 revues non prédatrices. Ces dernières années, les publications prédatrices en libre accès se sont multipliées et font tout pour attirer les chercheurs dans leurs filets, explique Le Monde. Contrairement aux revues savantes, elles n’ont pas de comité éditorial, facturent des frais aux chercheurs – quelques centaines d’euros par article. Elles publient en outre des articles qui n’ont fait l’objet d’aucune révision (ou d’une révision très sommaire) par les pairs (peer review). Les délais de publication sont extrêmement réduits. La CDD et le CNU Santé ont consigné une vingtaine de critères pour ne pas se faire piéger. Pour Pierre Corvol, ancien administrateur du Collège de France, auteur d’un rapport sur l’intégrité scientifique remis au gouvernement en 2016, « cette liste est une démarche utile et qui a l’avantage d’attirer l’attention sur l’importance de la publication ». « Cette initiative est une bonne façon de rappeler qu’il faut privilégier la qualité de la publication plutôt que le nombre de publications », déclare Didier Samuel, président-directeur général de l’Inserm, estimant par ailleurs qu’il serait intéressant « de croiser cette liste avec d’autres départements de sciences ouvertes et, pourquoi pas, celui de l’Inserm ». Et il met en garde : « Cette liste doit être évolutive et il ne faudrait pas laisser croire que toutes les revues qui n’y figurent pas seraient des revues prédatrices, il existe une zone grise. »
Le Monde, édition Science et Médecine, 05/07
L’invisibilisation de la santé des femmes au travail
Les spécificités féminines de la santé professionnelle restent méconnues et minimisées, dénonce un rapport d’une délégation sénatoriale. Après six mois d’auditions et de déplacements, cette délégation, composée de cinq sénatrices de bords politiques différents, a remis un rapport qui s’intéresse à la santé des femmes au travail. « Les spécificités féminines demeurent encore trop méconnues et insuffisamment prises en compte dans leur globalité », peut-on lire dans le rapport. L’invisibilisation des situations spécifiques aux femmes commence par le manque de données. La délégation dénonce « des connaissances encore parcellaires des statistiques sexuées et des spécificités féminines » avec notamment une extrapolation vers les femmes de certaines données épidémiologiques récoltées chez les hommes. Ce manque de données a même entravé les rapporteures de la délégation. « Ainsi, la Cnam [Caisse nationale d’assurance maladie] n’a pas été en mesure de fournir aux rapporteures des données sur la répartition des arrêts maladie par sexe, alors même qu’elle fournit de telles données par âge », dit le rapport. Ce manque de données ne concerne pas uniquement les secteurs où les femmes sont minoritaires, mais également les secteurs où elles sont largement majoritaires, comme le nettoyage. Ainsi, alors que les personnels de nettoyage sont exposés quotidiennement à des produits cancérogènes, aucune étude épidémiologique sur le lien entre ces métiers et le cancer n’existe, selon la délégation. La délégation constate en outre que « les postes de travail et l’organisation spatiale sont souvent pensés pour un homme de taille moyenne », laissant de côté les femmes. Cette absence de dimensionnement concerne également les équipements de protection.
UsineNouvelle.com, 04/07
En bref
Que Choisir Santé rend compte des effets psychologiques des fortes chaleurs. Le mensuel rappelle une étude d’épidémiologistes de l’Inserm, publiée l’été dernier, montrant que les suicides sont plus nombreux en France lors des journées chaudes. Ils ont pour cela relevé toutes les causes des 24,4 millions de décès, dont 500 000 suicides, observés depuis 1968 grâce au registre de l’Inserm. Le risque de suicide augmente de 1 à 2 % pour chaque augmentation de température de 1°C. « On ne parle pas là de températures extrêmes mais d’une augmentation continue du risque. Parmi les dix causes de décès les plus fortement liées à la chaleur, quatre impliquent le système nerveux, par exemple les AVC ou le suicide. Le système endocrinien semble lui aussi fragile face à la chaleur. Cela n’est pas étonnant, car ce sont des systèmes “senseurs” de l’organisme », estime le directeur de recherche Inserm Rémy Slama, qui a dirigé cette étude.
Que Choisir Santé, 01/07
Dans un entretien au Monde, Pierre Jouannet, de l’Académie de médecine, biologiste de la reproduction et professeur émérite à l’université Paris-Descartes, alerte sur le manque de données précises sur les étapes sensibles des fécondations in vitro. Il déplore : « Les possibles risques sur la santé des enfants nés par FIV sont peu connus ». Il explique qu’« on comptabilise plus de 1 500 publications dans les revues scientifiques sur la santé à moyen et long termes de ces enfants. Mais on est encore loin de tout savoir, puisque les plus âgés d’entre eux ont aujourd’hui une quarantaine d’années pour ceux nés d’une FIV, ou une trentaine pour ceux conçus par ICSI ». En France, « pas grand-chose n’a été entrepris pour la recherche dans ce domaine. C’est pourquoi l’Académie de médecine a recommandé que plus de moyens lui soient donnés pour assurer cette mission ».
Le Monde, édition Science et Médecine, 05/07
Le Monde rend compte d’une étude de faisabilité inédite de sport intensif pour mieux se rétablir d’un cancer. Elle est portée par le laboratoire Management Sport Cancer (MSC) d’Aix-Marseille Université, l’Institut Paoli- Calmettes (IPC), plus grand centre oncologique de la région provençale, et la faculté de médecine. Cette étude rend compte de la constitution d’une équipe de water-polo constituée de femmes ayant bouclé leur protocole de soins entre trois semaines et trois mois auparavant. Le tout sur seize séances, au rythme d’une par semaine et avec un encadrement par des entraîneurs professionnels, dans des conditions habituellement réservées aux sportifs de haut niveau. « Nous voulions étudier les bénéfices psychologiques et physiques d’une pratique sportive collective dans un esprit de compétition, et observer les effets de la relation avec le coach et les autres participantes sur les variables du rétablissement », définit Sarah Calvin, docteure en neurosciences et maîtresse de conférences, qui dirige les projets de recherche du laboratoire. Capacité cardio-respiratoire, force des quadriceps, amplitude des mouvements… A chaque séance, l’équipe de recherche a testé l’évolution physique des participantes. A l’aide de questionnaires, elle a aussi étalonné leur sentiment de bien-être et de confiance en soi.
Le Monde, édition Science et Médecine, 05/07
L’édition Science et Médecine du Monde se penche sur « les promesses de la transplantation fécale ». Il existe plusieurs hypothèses pour expliquer l’efficacité de la transplantation de microbiote fécal (TMF). Le microbiote du donneur pourrait se développer chez le receveur et empêcher la bactérie infectieuse de recoloniser le côlon. D’autres mécanismes peuvent entrer en jeu concernant les interactions entre donneurs et receveurs. L’infection récidivante à Clostridium difficile est la seule indication validée à ce jour pour recevoir une transplantation fécale. Selon une étude parue, en 2021, dans The Lancet, près de 2 000 TMF ont été réalisées en Europe en 2019, couvrant seulement 10 % des indications recommandées. En France, cette infection entraîne des milliers d’hospitalisations tous les ans. Mais, si le nombre de TMF ne cesse de croître et a doublé en cinq ans, il reste à un niveau confidentiel, avec 146 transplantations réalisées en 2022, selon Nicolas Benech, gastro-entérologue aux Hospices civils de Lyon, s’appuyant sur les données des sept centres français.
Le Monde, édition Science et Médecine, 05/07
La Tribune présente la startup Oncophysics, installée à Marseille, qui mêle physique et médecine afin de mettre au point un dispositif médical censé aider à lutter contre divers cancers solides (sein, prostate et pancréas en premier lieu). Oncophysics a été créée fin 2022 par Barthélémy Brossel, ancien journaliste qui a fait le choix de poursuivre et de valoriser les travaux de son père médecin-oncologue. Grâce à des nanoparticules aimantables, on peut – de manière très fine – ajuster le niveau de pression et, possiblement, modifier le comportement de la tumeur. A savoir réduire sa taille ou la maintenir en dormance, limitant ainsi le risque de métastase. La startup, dont la direction scientifique est portée par des chercheurs du CNRS et de l’Inserm, espère pouvoir apporter des preuves d’efficacité d’ici 2025, pour des essais enclenchés dès 2028
La Tribune, 05/07
Le Bus du Cœur des Femmes, qui avait offert, depuis septembre 2021, un dépistage gynécologique et cardiovasculaire à près de 7 000 femmes au plus près de chez elles, a été ravagé par un incendie dans la nuit de mercredi à jeudi à Bobigny, où il était installé pour trois jours. Préjudice : 300 000 euros, déplorent les deux pilotes du projet, la Pr Claire Mounier-Vehier, cardiologue et médecin vasculaire au CHU de Lille, et Thierry Drilhon, administrateur d’entreprises et président de la Chambre de commerce franco-britannique. « Chaque jour, 200 femmes en France meurent de maladie cardiovasculaire et, grâce à la prévention, on pourrait éviter à 80 % d’entre elles d’entrer dans la maladie », explique Thierry Drilhon, qui entend « sauver 10 000 femmes par an ». Une cagnotte a été lancée vendredi après-midi sur le site helloasso.com pour acquérir un nouveau bus et sa remorque, les aménager, et racheter l’ensemble du matériel médical nécessaire. Passée l’urgence, les fondateurs veulent désormais reprendre les tournées prévues à partir de mi-septembre à Maubeuge, Calais et Lille.
Le Figaro, 05/07